StartseiteL'après-épuration : réintégrer les fonctionnaires après une rupture politique (Europe, XIXe-XXe siècle)
L'après-épuration : réintégrer les fonctionnaires après une rupture politique (Europe, XIXe-XXe siècle)
Post-purges periods : reinstating civil servants after a political change (Europe, 19th-20th centuries)
Veröffentlicht am jeudi, 29. mars 2012
Zusammenfassung
Inserat
L’après-épuration : réintégrer les fonctionnaires après une rupture politique (Europe, XIXe-XXe siècles)
Argumentaire
Assurément, les moments épuratoires consécutifs aux changements de régimes constituent l’un des passages obligés de l’historiographie, encore étroite, des fonctionnaires : de fait, ces phases représentent une traduction administrative attendue du nouveau cours politique, à savoir la nécessité de se débarrasser des fonctionnaires liés à l’ordre révolu et le souhait d’attacher au pouvoir naissant un personnel neuf et dévoué. Mais les études disponibles révèlent que les épurations sont souvent tempérées, voire neutralisées dans leurs effets par des considérations pragmatiques ayant trait à la pénurie des agents formés, au besoin pour les nouveaux dirigeants de disposer de compétences et de savoir-faire acquis par l’administration, et le cas échéant de faire face aux défis de la reconstruction du pays après une guerre. Aussi n’est-il pas rare, voire inévitable, que les proclamations ou les velléités initiales de rupture soient démenties au fil des réintégrations, après une période d’épuration plus ou moins sévère que prolonge un temps de purgatoire plus ou moins long, en dépit du caractère embarrassant de ces réadmissions au plan politique, tant pour les nouveaux dirigeants que pour l’administration elle-même et l’opinion.
Il est temps désormais de prendre à bras le corps cet « objet nouveau » d’histoire que constituent les réintégrations de fonctionnaires et que signalaient il y a peu Marc Bergère et Jean Le Bihan (Fonctionnaires dans la tourmente, Genève, L’équinoxe, 2009, p. 30). À la croisée de l’histoire politique, institutionnelle et sociale, le phénomène mérite un examen approfondi, car il fait pénétrer l’historien au cœur du fonctionnement et de la spécificité interne des administrations. Ce colloque se propose de mettre en perspective diverses expériences de réintégrations de fonctionnaires survenues après une épuration consécutive à un changement politique en Europe au XIXe ou au XXe siècle. Certes le terme d’épuration n’est pas toujours employé en tant que tel dans la langue de l’époque : la réflexion pourra englober les mesures de disqualification ou de lustration à l’échelle administrative.
L’amplitude chronologique et le choix d’un vaste terrain d’enquête devraient permettre de décloisonner les études de cas et d’inviter l’ensemble des participants à une réflexion comparative, voire transnationale, propre à mieux comprendre en retour les spécificités de chaque contexte. Cette rencontre pourra notamment parvenir à une typologie du phénomène des réintégrations de fonctionnaires, en distinguant selon la nature des régimes mis en place, leur origine révolutionnaire ou non, les différents secteurs administratifs, ou les diverses pressions (militaires, économiques, idéologiques etc.) s’exerçant sur les acteurs en présence. Faire dialoguer des travaux déjà nombreux portant sur différents pays européens mais qui souvent s’ignorent, défiger au besoin les catégories établies de sphère politique et de classe administrative, déborder la chronologie usuelle des épurations par la prise en compte de leurs surlendemains, tels sont donc les partis-pris de cette enquête nécessairement collective. Les propositions de communications, qui pourront venir de l’histoire, de la science politique, de la sociologie, ou de la littérature, s’inscriront dans l’un ou plusieurs des axes suivants :
Premier axe : Mesures
Le terme mesure sera entendu dans son double sens de processus normatif et législatif et de quantification. Le premier sens renvoie au cadre réglementaire : on sera attentif à la distinction importante entre les simples mesures de « dés-épuration » (grâces, amnisties, droit à pensions…) et les réintégrations véritables, car les fonctionnaires peuvent bénéficier des unes sans obtenir l’autre. Cette clarification permettra d’éviter les confusions habituelles propres à nourrir de nombreux fantasmes. Les communications pourront ainsi porter sur les procédures engagées par les fonctionnaires (ont-ils le droit de prétendre au même poste, aux mêmes fonctions, au même endroit ?), bref sur le contentieux des réintégrations. Un second volet portera sur la manière dont l’historien peut aujourd’hui chiffrer, ou du moins estimer, l’ampleur du phénomène des réintégrations post épuratoires de fonctionnaires dans un contexte donné. Cet axe permettra de distinguer les réintégrations marginales ou au contraire massives en établissant des comparaisons et en en creusant les raisons. Une périodisation fine signalera le rythme des retours et le contexte qui préside aux appels d’air. Il serait également opportun de se demander si l’administration qui réintègre a connaissance du parcours antérieur de l’agent et notamment de son limogeage, ce qui renvoie aux capacités techniques de l’administration en matière de fichage et de contrôle des fonctionnaires.
Deuxième axe : Carrières
Un second volet pourra étudier des trajectoires de fonctionnaires traversant ainsi plusieurs régimes. Comment se déroulent leurs carrières ? Une reconversion, une mutation ou une dégradation sont-ils le prix à payer pour rebondir ? À quel rang les fonctionnaires réintégrés peuvent-ils prétendre ? Il est en effet permis de se demander si quelque mur invisible ne vient pas brider, au moins temporairement, leurs ambitions. Des comparaisons de carrière entre les anciens et nouveaux fonctionnaires seront nécessaires pour entrer dans la diversité de chaque administration. L’usage de la méthode prosopographique s’annonce fructueux à ce sujet et permettra d’éprouver la validité de l’hypothèse de réintégrations s’effectuant à différentes temporalités : celles à court terme qui viennent corriger le caractère injuste de certains limogeages, celles de moyen terme visant à rappeler des fonctionnaires compétents utiles pour re-professionnaliser l’administration, et enfin celles survenues à plus long terme lors d’un nouveau changement de régime venant annuler les effets du précédent.
Troisième axe : Pratiques professionnelles
Un troisième volet interrogera les conséquences de ces réintégrations sur la pratique administrative. Les anciens fonctionnaires servent-ils à former les nouveaux, moins au courant des dossiers ? Par ailleurs, les fonctionnaires réintégrés favorisent-ils dans leur travail et dans leurs attributions une politique particulière ? Ou au contraire s’adaptent-ils au nouveau contexte sans que l’on puisse déceler dans leur travail des traces de leurs services passés ? Perçoit-on une sorte d’unification des pratiques au sein des administrations, tenant compte des apports des uns et des autres ? On pourra notamment se demander si, dans une volonté de normalisation et d’homogénéisation du corps étudié, on n’assiste pas corollairement aux réintégrations à une remise à plat des entrées ou des promotions extraordinaires opérées au cours de la rupture politique.
Quatrième axe : Représentations
Un dernier volet portera sur les représentations attachées aux fonctionnaires réintégrés et véhiculées tant dans l’administration que dans le milieu politique et dans l’opinion publique. Ces réintégrations relèvent-elles du tabou ? Ou bien donnent-elles lieu à des commentaires et des critiques, dans la presse, dans la sphère parlementaire ou dans la littérature ? S’il existe des attaques, sont-elles le fait d’extrémistes des deux bords, anciens amis des épurés et partisans intransigeants du nouveau régime ? La rhétorique de la demande de réadmission, la manière dont le fonctionnaire traverse cette expérience, entre amertume d’une déchéance et fierté d’une réparation, puis se livre à un plaidoyer pro domo conforme à un éthos collectif, auront également toute leur place dans ce cadre. Cette partie pourra faire resurgir les spécificités nationales avec l’intériorisation plus ou moins poussée de l’éthique de la neutralité politique selon les pays.
Modalités
Les propositions de communication (un texte de 300 mots environ en vue d’une communication ne dépassant pas 30 minutes) sont à adresser aux organisateurs du colloque :
pour le 15 juin 2012
Informations
La publication des actes est prévue pour 2014.
Lieu et date : 30-31 mai 2013, MSH, Université d’Angers
Organisateurs
- Aurélien Lignereux
- Marie-Bénédicte Vincent
- Giliane Thibault
Université d’Angers, UMR CNRS 6258 CERHIO
Comité scientifique
- Marc Bergère (Université Rennes 2)
- Yves Denéchère (Université d’Angers)
- Pierre Karila-Cohen (Université Rennes 2)
- Jean Le Bihan (Université Rennes 2)
- Aurélien Lignereux (Université d’Angers)
- Marie-Bénédicte Vincent (Université d’Angers)
Kategorien
- Geschichte (Hauptkategorie)
- Zeitraum > Neuere und Zeitgeschichte > 19. Jahrhundert
- Zeitraum > Neuere und Zeitgeschichte > 20. Jahrhundert
- Gesellschaft > Politikwissenschaften > Politikgeschichte
- Geographiscer Raum > Europa
- Gesellschaft > Politikwissenschaften > Politische Soziologie
- Gesellschaft > Politikwissenschaften > Politik und öffentliche Aktionen
- Gesellschaft > Geschichte > Sozialgeschichte
Orte
- 5 bis boulevard Lavoisier (Université d'Angers, Maison des Sciences Humaines)
Angers, Frankreich
Daten
- vendredi, 15. juin 2012
Schlüsselwörter
- Fonctionnaires, épurations, réintégrations, Europe, XIXe siècle, XXe siècle
Kontakt
- Giliane Thibault
courriel : giliane [dot] thibault [at] univ-angers [dot] fr
Informationsquelle
- Marie-Bénédicte Vincent
courriel : marie_benedicte [dot] vincent_daviet [at] univ-fcomte [dot] fr
Zitierhinweise
« L'après-épuration : réintégrer les fonctionnaires après une rupture politique (Europe, XIXe-XXe siècle) », Beitragsaufruf, Calenda, Veröffentlicht am jeudi, 29. mars 2012, https://calenda-formation.labocleo.org/207904