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Géopolitique du riz
Geopolitic of the rice boom
Publié le jeudi 28 avril 2016
Résumé
Dans le cadre d’un numéro thématique, la revue Les Cahiers d’Outre-Mer lance un appel à contribution sur « la géopolitique du boom rizicole ». Il s’agira de rendre compte des reconfigurations, des nouvelles dynamiques et des nouveaux enjeux qui travaillent le secteur rizicole.
The french journal Les Cahiers d’Outre-Mer is launching a call for papers to edit a special issue on the “geopolitic of the rice boom”. The purpose is to explore the patterns of rice through its reconfigurations, its new dynamics and the new issues carried out by the rice sector in the world.
Annonce
Les Cahiers d’Outre-Mer (COM) sont une revue semestrielle, référencée par l’AERES/HCERES, dotée d'un comité de rédaction et d'un comité scientifique, publiée par les Presses universitaires de Bordeaux, et soutenue par le laboratoire LAM (UMR 5115) « Sciences Po Bordeaux ».
Les COM sont animés par une équipe pluridisciplinaire, soucieuse de l’interaction entre politique et espace, entre milieux et sociétés. Dans le cadre d’un numéro thématique (n°274), la revue lance un appel à contribution sur « la géopolitique du boom rizicole ». Il s’agira de rendre compte des reconfigurations, des nouvelles dynamiques et des nouveaux enjeux qui travaillent le secteur rizicole.
Argumentaire
Le monde depuis 1945 traverse une période de mutations profondes, plurielles et à un rythme accéléré. À ce titre, le bouleversement de la carte du riz est intéressant à étudier, problématique à la croisée de plusieurs grandes dynamiques aujourd’hui à l’œuvre. Céréale la plus cultivée au monde, le riz est considéré comme l’un des éléments-clés permettant d’assurer la sécurité alimentaire de la planète. Pourtant, la flambée des prix de 2008 a montré les limites du système actuel quant à remplir ce rôle, et amène à s’interroger sur les enjeux tant stratégique que productif de la plante verte dans le monde. Elle a aussi amené les États et les acteurs à multiplier, les initiatives permettant de parler d’un véritable « boom rizicole » dont il faut rendre compte, à toutes les échelles possibles.
Plusieurs points d’entrée transversaux sont envisageables (liste non exhaustive) :
Gouvernance de la faim
Le riz tient une place centrale dans la construction de solutions technologiques à la question de la faim, problématisée par les institutions internationales au sortir de la seconde guerre mondiale. La Révolution Verte naturalise la mise en dépendance de la riziculture des Suds par les industries des Nords. Céréale au plus petit génome, le riz fait l’objet d’une production intense de variétés améliorées, hydrides ou OGM. Combinées à l’utilisation massive de produits phytosanitaires, à la mécanisation des façons culturales et à la diffusion de l’irrigation, elles permettent d’atteindre aujourd’hui des rendements extrêmement élevés de près de 10 tonnes à l’hectare. Cependant, l’adoption du protocole de la Révolution Verte est inégale et se creuse une profonde inégalité technologique entre pays. Aujourd’hui, les rendements stagnent dans les bassins de production américains, européens et asiatiques. Le déploiement de ce kit technologique notamment en Afrique subsaharienne rencontre des obstacles financiers et de disponibilité des ressources naturelles. Quelles sont alors les perspectives d’avenir de la Révolution Verte, symbole des technosciences, qui s’essouffle dans les pays traditionnellement riziculteurs et qui peine à s’implanter dans ceux qui ambitionnent de le devenir ? Quels sont les enjeux de pouvoir pour la maîtrise technologique de l’alimentation de la population dans les États modernes ? Comment, face aux dégâts environnementaux engendrés par l’agriculture intensive, le discours de la Révolution Verte s’oppose-t-il aujourd’hui face à celui de l’agro-écologie, alternative montante qui gagne des partisans au sein même des institutions internationales ?
Le retour des projets d’aménagements hydrorizicoles ?
L’irrigation, qui permet par la maîtrise de l’eau une augmentation considérable des rendements rizicoles, semble remise au goût du jour notamment en Afrique subsaharienne. En effet, déjà répandue en Asie, cette technologie n’y dispose plus de marge de croissance importante notamment à cause de l’épuisement des ressources hydriques et d’une pression foncière toujours croissante. En Amérique, des pays importent un riz étasunien, brésilien ou argentin essentiellement, mais dans une proportion bien moindre que les importations asiatiques des nations africaines. Pour tous, la souveraineté alimentaire semble (re)devenir un enjeu national. Les aménagements hydrauliques ont montré être source de conflits liés à des intérêts divergents : conflit d’usage, conflit d’accès aux ressources de l’aménagement, enjeux de pouvoir quant l’État use des projets afin de se spatialiser, etc. Au niveau local, lorsque ces aménagements sont laissés à un usage public, l’introduction de nouvelles technologies dans des sociétés agraires qui n’y sont pas préparées rencontre inévitablement de lourds obstacles. Des stratégies paysannes émergent de cette imposition de pratiques. Quels résultats sont issus de ces confrontations ? Quel genre de gouvernance se construit sur ces nouveaux territoires ?
Reconfiguration de l’économie rizicole mondiale
Ainsi des État font-ils le choix de remettre la production nationale au cœur de leur stratégie agricole afin de réduire une dépendance héritée de la période des plans d’ajustement structurel. En Asie, malgré l’ouverture des économies des principaux pays exportateurs de riz aux échanges internationaux, la production rizicole est d’abord un instrument d’économie politique garant de la paix sociale avant d’être une spécialisation découlant d’un avantage comparatif. Cette remise en cause indirecte de l’idéologie dominante du libéralisme illustre le débat opposant ses partisans et ceux estimant le marché incapable de sécuriser l’alimentation des pays les plus pauvres. La libéralisation des économies s’accompagne aussi de l’intégration au marché des économies familiales rurales des pays les plus pauvres. Celles-ci sont sujettes à de nouvelles dynamiques à grande échelle, telles que les accaparements fonciers ou de production avec le développement de l’agriculture sous contrat, les processus d’enclosures ou encore la globalisation des risques alimentaires ou climatiques. Il est légitime de s’interroger alors sur les impacts, positifs comme négatifs, que peut avoir cette nouvelle configuration de la production rizicole sur les sociétés paysannes et leur environnement.
Bibliographie
Ahmadi N., et al., 2012. « Les céréales ». In : Mémento de l’agronome, Éditions du GRET, Éditions Quae, Ministère français des Affaires Étrangères, p. 777-829.
Cornilleau L., Joly P.-B., 2014. « La révolution verte, un instrument de gouvernement de la « faim dans le monde ». Une histoire de la recherche agricole internationale ». In : Le gouvernement des technosciences. Gouverner le progrès et ses dégâts depuis 1945, Pestre D. (dir.), Paris : La Découverte, Coll. « Recherches », pp. 171-201.
Janin P., 2008/4. « Crise alimentaire mondiale. Désordres et débats ». Hérodote, Les enjeux de la crise alimentaire mondiale, n° 131, p. 6-13.
Lançon F., 2012. « Le riz : un produit vivrier local ou une céréale globale ? ». In: Déméter 2012 : économies et stratégies agricoles, Paris : Club Déméter, p. 57-116.
Lavigne Delville P., Boucher L., 1998. Les bas-fonds en Afrique tropicale humide. Guide de diagnostic et d’intervention. Paris, Wageningen : Éditions du GRET, Ministère de la Coopération, CTA, Coll. « Le Point sur les technologies », 416p.
Subra P., 2008/3. « L’aménagement, une question géopolitique ! ». Hérodote, Guerre et conflit, n° 130, p. 222-250.
Responsable scientifique
Charlotte Torretti, LAM (Les Afriques dans le Monde), UMR 5115 CNRS/Sciences Po Bordeaux et Université Bordeaux Montaigne.
Modalités de soumission
Le résumé comprenant un titre, présentation de l’article, objets et méthodes, ainsi que nom, prénom, statut, rattachement institutionnel et e-mail de l’auteur-e (3 000 mots maximum) doit être envoyé
pour le 30 juin 2016
par e-mail en fichier attaché (format .doc ou .docx) à Charlotte Torretti (torretti.charlotte@gmail.com) et au secrétariat de rédaction des COM (c.cazenave@sciencespobordeaux.fr).
L’article complet (50 000 signes maximum, comprenant les résumés français et anglais, la bibliographie et la présentation du/des auteur-e-s) doit être envoyé pour le 02 novembre 2016, par e-mail en fichier attaché (format .doc ou .docx) à Charlotte Torretti (torretti.charlotte@gmail.com) et au secrétariat de rédaction des COM (c.cazenave@sciencespobordeaux.fr).
Les règles de publication ainsi que les modalités d’évaluation seront disponibles sur le site de la revue.
Les Cahiers d’Outre-Mer is a peer-reviewed journal published by the Presses Universitaires de Bordeaux witht the support of the research unit Les Afriques dans le Monde (UMR 5115 Sciences Po Bordeaux and CNRS). The journal focuses on Global South and development dynamics. Papers both in French and English are published.
Calling for papers in a special issue on the « Geopolitics of the rice boom ». Its purpose is to explore the ongoing reconfigurations, new dynamics and the new issues in the rice sector in the world.
Argument
Since 1945 the world is going through a period of deep and plural changes at an accelerating pace. As such, the disruption of the rice map is an interesting case study at the crossroads of several main dynamics. Rice, the most cultivated cereal around the world, is considered as one of the key elements of global food security. However, the 2008 price surge showed the limit of the current system to fulfill this role, raising issues about strategic as productive stakes of the green plant in the world. It also led the states and various actors to multiply initiatives at the core of a « rice boom » we are focusing on at all possible scales.
Several transversal entry points are possible (non exhaustive list):
Governance on hunger
Rice is central to the construction of technological solutions to the hunger and food security issue – an issue problematised by international institutions after the Second World War. The so-called Green Revolution enrolls the dependency of rice culture from the Southern countries by the industries of the North. Cereal with the smallest genome and as such relatively easy to manipulate, rice is subject to an intense production of improved, hybrids or GMO varieties. Combined with the massive use of agrochemicals, mecanisation and irrigation technology, those new varieties reach extremely high yields (about 10 tons per hectare). However, the adoption of the protocol of the Green Revolution is inequal and a deep technological inequality is worsening between countries, regions and farms. Today, the yields are stagnating in the American, European and Asian production areas. The spreading of this technological package meets up with financial issues and availability of natural ressources as in Sub-Saharan Africa. Then what are the future perspectives for the Green Revolution package, symbol of technosciences? Isn’t it running out of steam in traditionnal rice producing countries and facing deep challenges in the new producing ones? What are the power and political issues for the technological control of food production in modern states? Facing the environmental damages due to intensive agriculture, how does the discourse and narratives of the Green Revolution oppose the rising agroecology’s ones, a worldwide alternative currently gaining growing support within international institutions?
Back to the hydro-agricultural schemes ?
Irrigation, a water technology that significantly increase yields, seems to be back to the forefront particularly in Sub-Saharan Africa. Indeed, in Asia this widely spread technology does not have an important margin for growth in particular because of depletion of hydraulic ressources and of a steadily increasing pressure on land. In America, countries import rice mainly from the USA, Brazil or Argentina but lesser proportion than African nations import Asian rices. However, in each and every country, national food sovereignty resumes to become a political issue. Water for production projects are sources of conflicts linked to divergent interests: land use conflict, conflict of access to natural ressources, power issues at several scales especially when development projects are part of a state’s spatialization strategy, etc. At a local level, when infrastructures are public, the introduction and dissemination of new technologies as such as irrigation within agrarian societies which are not prepared for it encounter inevitably serious challenges. Facing these issues new peasant strategies emerge. Which dynamics result from the confrontation between rice schemes, land planning and peasantries? Which kind of governance is emerging on those news territories?
Reshaping the global rice economy
Thus some states choose to put national production back at the core of their agricultural agenda in order to reduce the external dependency which dates back to the period of structural adjustment plans. In Asia, despite the openness of the main rice exporters economies to international trade, rice production remains a tool of political economy to maintain social peace before being a national specialization considered as a comparative advantage. This calls for questioning the dominant ideology of liberalism and illustrates debates opposing its partisans and the ones considering the global market as unable to insure food security for the poor. The liberalization comes along with deeper integration to international market of the rural and peasant households of even the poorest countries. These families become subjects of new global dynamics such as land or production grabbing, going along with the development of the outgrowing agriculture, the enclosing processes or the globalization of the food and climate risks. Then it is legitimate to question the impacts, positive as negative, that can be caused by this new configuration of rice production on populations and environments.
Bibliography
Ahmadi N. et al., 2012. « Les céréales ». In: Mémento de l’agronome, Éditions du GRET, Éditions Quae, Ministère français des Affaires Étrangères, p. 777-829.
Cornilleau L., Joly P.-B., 2014. « La révolution verte, un instrument de gouvernement de la « faim dans le monde ». Une histoire de la recherche agricole internationale ». In: Le gouvernement des technosciences. Gouverner le progrès et ses dégâts depuis 1945, Pestre D. (dir), Paris : La Découverte, Coll. « Recherches », p. 171-201.
Janin P., 2008/4. « Crise alimentaire mondiale. Désordres et débats ». Hérodote, Les enjeux de la crise alimentaire mondiale, n° 131, p. 6-13.
Lançon F., 2012. « Le riz : un produit vivrier local ou une céréale globale ? ». In: Déméter 2012 : économies et stratégies agricoles, Paris : Club Déméter, p. 57-116.
Lavigne Delville P., Boucher L., 1998. Les bas-fonds en Afrique tropicale humide. Guide de diagnostic et d’intervention. Paris, Wageningen : Éditions du GRET, Ministère de la Coopération, CTA, coll. « Le Point sur les technologies », 416p.
Subra P., 2008/3. « L’aménagement, une question géopolitique ! ». Hérodote, Guerre et conflit, n° 130, p. 222-250.
Editor
Charlotte Torretti, University of Bordeaux Montaigne, UMR LAM « Les Afriques dans le Monde » 5115 (CNRS/Sciences Po Bordeaux).
Procedure for the submission
Full article (50 000 characters max.) or abstract (3000 words max.) with title, paper presentation, subject and methods, author’s name, institution and e-mail must be sent by e-mail (attached file .doc or .docx)
before June 30th, 2016
to Charlotte Torretti (torretti.charlotte@gmail.com) and to the editorial secretariat of the journal (c.cazenave@sciencespobordeaux.fr).
Full articles of the selected abstracts will be expected before November 2nd, 2016.
Catégories
- Géographie (Catégorie principale)
- Sociétés > Économie
- Sociétés > Études du politique
Dates
- jeudi 30 juin 2016
Fichiers attachés
Mots-clés
- riz, géopolitique
Contacts
- Charlotte Torretti
courriel : torretti [dot] charlotte [at] gmail [dot] com
Source de l'information
- Charlotte Torretti
courriel : torretti [dot] charlotte [at] gmail [dot] com
Licence
Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la CC0 1.0 Universel.
Pour citer cette annonce
« Géopolitique du riz », Appel à contribution, Calenda, Publié le jeudi 28 avril 2016, https://calenda-formation.labocleo.org/360638