Calenda - Le calendrier des lettres et sciences humaines et sociales
La cartographie parcellaire dans les campagnes d'Ancien Régime (Europe, Amériques, Asie), de la production aux usages
Land-Plot Mapping in Early Modern Rural Societies (Europe, Americas, Asia): from Production to Uses
Veröffentlicht am mercredi, 25. avril 2018
Zusammenfassung
Malgré leur richesse, ces sources restent encore considérées comme des documents secondaires, dépendant d’un corpus écrit qui fournirait, seul, la matière légitime d’une étude historique. Le repérage, la numérisation et la mise en ligne des cartes parcellaires anciennes s’accélère pourtant et occupe archivistes, conservateurs, archéologues et chercheurs. Mais nous ne pouvons en dire autant de leur analyse historique, en dépit des travaux réalisés par les historiens ruralistes et les historiens de la cartographie. Cette rencontre s’adresse aux chercheurs ayant une connaissance approfondie d’un large corpus de cartes parcellaires. Le but de nos discussions est la préparation d’un ouvrage synthétique sur la question – qui ne se limitera pas aux actes du colloque.
Despite their richness, these sources are still considered as secondary documents, dependent on a written corpus which could provide, alone, the legitimate subject of a historical study. Nevertheless the identification, digitization and online publishing of old maps have accelerated and keep busy archivists, curators, archaeologists and researchers. But the same can’t be said of their historical analysis, despite the work done by rural historians and historians of cartography. This conference will bring together researchers with a thorough knowledge of a large corpus of maps. The purpose of the conference is the preparation of a synthetic publication on the subject – which won’t be limited to the proceedings of the conference.
Inserat
Argumentaire
Exceptionnelles au moyen-âge, fréquentes aux XVIe et XVIIe siècles dans les pays nordiques, produites en quantité dans toute l’Europe et ses possessions coloniales au XVIIIe siècle, mais aussi dans le Japon de l’époque d’Edo et la Chine impériale des Qing, les cartes parcellaires n’ont pas attendu les cadastres géométriques et généraux du XIXe siècle pour s’imposer. Fierté des archives locales, ces cartes sont depuis longtemps le clou d’expositions retraçant le passé d’un village. Grâce à leur numérisation et leur mise en ligne massives, elles ornent désormais les sites internet des mairies et deviennent accessibles à tous, satisfaisant tout autant la curiosité des habitants que le travail des chercheurs. La place d’honneur qu’elles occupent tient principalement à leurs qualités esthétiques et à leur capacité à évoquer un lieu, aisément reconnaissable pour un lectorat d’origine locale, là où un texte ancien paraîtra rebutant et ne sera lisible que par un spécialiste.
Malgré cette visibilité, ces sources restent pourtant considérées comme des documents secondaires, dépendant d’un corpus écrit qui fournirait, seul, la matière légitime d’une étude historique. Les ruralistes ont néanmoins très tôt compris tout le profit que l’on pouvait tirer de ces témoignages sur l’organisation spatiale, économique et sociale ancienne des communautés villageoises. L’article que leur consacre Marc Bloch, dans le tout premier numéro des Annales, en 1929, témoigne de la vivacité de cette démarche scientifique dans plusieurs pays européens de l’entre-deux-guerres. Cette tradition historiographique reste ininterrompue jusqu’à aujourd’hui, renforcée par les possibilités que l’informatique donne à l’utilisation de ces sources. Mais si des analyses pénétrantes sur la réalisation et l’usage des parcellaires se retrouvent dans quantité de travaux locaux et régionaux, les synthèses nationales et, plus encore, européennes restent rares et partielles – malgré le projet d’enquête systématique lancé par Marc Bloch et jamais réalisé. Signe de la centralité du texte par rapport à la carte, c’est en tant qu’appendices de sources textuelles qu’on connaît encore le mieux les conditions de leur production, de leur circulation et de leur emploi. Le colloque de Paris de 1998 sur les terriers et plan-terriers, qui mène une comparaison européenne centrée sur la France, et celui de 2003, consacré au cadastre et couvrant de manière plus serrée et plus homogène l’ensemble du continent, se situent dans cette démarche.
Dans une perspective différente, l’histoire de la cartographie, qui connaît un fort développement depuis quarante ans, s’est aussi intéressée à ce type de sources, même si les cartes à plus petite échelle – globes, mappemondes et atlas régionaux – ont suscité plus d’engouement. À partir des années 1990, les travaux initiés en Angleterre, entre autres par Roger Kain, Élisabeth Baigent et David Buisseret, ont ainsi mis la carte parcellaire au centre de leurs interrogations. Ils ont cherché à reconstruire les conditions sociales de sa production et de son usage, en insistant tout particulièrement sur le couple commanditaire/cartographe. Le développement de la carte parcellaire des années 1570 à 1800 semble associée dans un premier temps à l’apparition de nouveaux modes de gestion domaniale, intimement liés à une intégration à un marché des produits agricoles, puis à l’adoption progressive de cet outil par les autorités publiques dans leurs politiques fiscales, en dépit des résistances qu’il suscite. La richesse des fonds anglais et le dynamisme de l’histoire de la cartographie outre-Manche ont contribué à stimuler la recherche dans d’autres espaces, mais ont aussi révélé le retard pris dans certaines entreprises et le cloisonnement des initiatives locales.
Le repérage, la numérisation et la mise en ligne des cartes parcellaires anciennes s’accélère et occupe archivistes, conservateurs, archéologue et historiens à travers toute l’Europe. Ces démarches, de moins en moins isolées ont déjà suscité échanges et travaux de synthèse à l’échelle du continent, comme à Pise en 2016. Mais nous ne pouvons en dire autant de l’analyse historique de ces corpus, qui restent encore largement sous-exploités. De nombreuses questions ne trouvent pour le moment que des réponses à l’échelle locale ou nationale, alors qu’elles concernent des processus visibles à l’échelle du continent et de ses colonies. Outre l’éclatement des traditions académiques, la difficulté principale des historiens consiste à envisager des sources ancrées dans la variété des systèmes sociaux, économiques et politiques de l’époque moderne, qui contrastent avec la normalisation des entreprises cadastrales d’État, lancées à partir du début du XIXème siècle. De plus, l’héritage de logiques d’archivages anciennes, avec la constitution arbitraire de collections de cartes isolées de leur environnement documentaire original, confronte souvent le chercheur à un corpus muet.
Notre objectif est de surmonter ces obstacles en engageant une comparaison des logiques de production et des usages sociaux, dans un cadre européen et colonial, voire plus large encore, des cartes parcellaires rurales d’Ancien Régime. Par ce terme, nous comprenons tout type de représentation graphique de portions de terrain avec une même culture et appartenant à un même possesseur ou à une même catégorie de possesseurs, dans un contexte sociojuridique où existent une superposition et une diversité des droits de propriété. Cela exclut a priori les plans urbains, où sont principalement représentées des parcelles bâties, mais aussi les cadastres généraux établis par les États et fondés sur l’égalité devant l’impôt, comme ceux lancés sous Napoléon en 1807 ou François Ier d’Autriche en 1818. Mais cela englobe une palette très large de cartes à grande échelle, produites pour une pluralité d’usages – contentieux, taxation, inventaire à finalité économique, opération de prestige, remembrement, colonisation – et de commanditaires – seigneuries ecclésiastique ou laïque, État, communauté villageoise, simple particulier – sur une période allant du XVème au milieu du XIXème siècle.
Cette rencontre s’adresse aux chercheurs ayant une connaissance approfondie d’un large corpus de cartes parcellaires et capables de mener une réflexion sur les quatre points suivants, détaillés dans le questionnaire ci-joint :
- Pourquoi fait-on des cartes parcellaires ? (Commanditaires, normativité de la carte, valeur juridique de l’arpentage et de la production cartographique, usages théoriques)
- Comment les fait-on ? (Techniques et vocabulaire cartographique, auteurs visibles et auteurs invisibles, calcul économique du coût de la carte)
- Quels en sont les usages sociaux, économiques et culturels des contemporains ? (Valeur juridique de la carte, usages constatés, modifications et circulations, archivage et péremption, carte et appréhension de l’espace)
- Qu’en fait l’historien et comment cela justifie-t-il la constitution de son corpus de recherche (sources à la fois cartographiques et textuelles) ? (Approche historiographique et tradition académique régionale ou nationale, nature du document cartographique pour les contemporains, constitution du corpus de recherche, exploitations actuelles)
Le but ultime de notre échange est la préparation une publication synthétique, qui sera éditée en partenariat avec les Presses Universitaires de Rennes et les Éditions Universitaires d’Avignon. Les chapitres de cet ouvrage ne seront pas les actes du colloque, mais des textes dont la rédaction prendra en compte les reformulations apportées aux problématiques initiales au cours des discussions. Y seront également intégrés des papiers supplémentaires, n’ayant pas fait l’objet d’une présentation orale.
Modalités de soumission
Les résumés de propositions d’intervention doivent être envoyés par mail aux deux organisateurs (3500 caractères maximum) et accompagnés d’un bref CV (affiliation institutionnelle, principales publications) d’une page, sous la forme de deux fichiers pdf, avant le 6 juin 2018. Les langues de travail sont le français et l’anglais. La nouveauté et la richesse des approches proposées, ainsi que la diversité des origines géographiques des corpus traités, afin de couvrir un espace le plus large possible, seront les critères principaux de la sélection des interventions au colloque et des articles de la publication finale. L’inscription est gratuite et les frais d’hébergement seront pris en charge par les organisateurs.
Le colloque est organisé par les laboratoires CREAAH UMR 6566, Université de Rennes 2) et CNE (UMR 8562, Université d’Avignon).
benjamin.landais@univ-avignon.fr, annie.antoine@univ-rennes2.fr
Calendrier
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6 juin/June 2018 : clôture de l’appel à communication / deadline for proposals
- 16 juillet/July 2018 : annonce des communications retenues / announcement of the accepted proposals
- 21-23 mars/March 2019 : colloque à Rennes / conference in Rennes (France)
- 2019-2020 : publication des textes remaniés / publication of revised papers
- (éditeurs / publishers : collaboration Presses Universitaires de Rennes et Éditions Universitaires d’Avignon).
Comité scientifique
- Annie Antoine, CREAAH - UMR 6566, Université de Rennes 2
- Benjamin Landais, Centre Norbert Elias - UMR 8562, Université d’Avignon
- Boris Deschanel, Centre Norbert Elias - UMR 8562, Université d’Avignon
- Nicolas Verdier, C.N.R.S. - UMR 8504, E.H.E.S.S.
- Florent Hautefeuille, Laboratoire TRACES - UMR 5608, Université Toulouse Jean Jaurès
- Guillaume Carré, EHESS, CRJ
- Tim Soens, professeur à l'université d'Anvers
Argument
Extremely rare in the Middle Ages, frequent in the 16th and 17th centuries in the Nordic countries, produced in large quantities throughout Europe and its colonial possessions in the 18th century, land-plot mapping (estate maps, farm plans, enclosure maps, cadastral survey plans, judicial survey plans, etc.) did not wait for the geometric and general cadastre of the 19th century to conquer the continent. They were also numerous in colonial America, but also in Japan during the Edo period and during the Qing Empire in China. As the pride of local archives, these maps have long been the highlight of exhibitions retracing the past of a village. Thanks to their digitization and online publication, they now adorn the websites of city councils and have become accessible to all, satisfying the curiosity of local inhabitants as much as the work of researchers. The important role they play is mainly due to their aesthetic qualities and their ability to evoke a place, easily recognizable for a readership of local origin, where an old text will seem off-putting and only readable by a specialist.
Despite this visibility, these sources are nevertheless considered as secondary documents, depending on a written corpus that is thought to provide, alone, the legitimate subject of a historical study. Nevertheless rural historians understood very early how much profit could be drawn from these testimonies on the ancient spatial, economic and social organization of village communities. The article that Marc Bloch devoted to them in the very first issue of the Annales, in 1929, attests to the vivacity of this scientific approach in several European countries in the interwar period. This historiographic tradition has remained uninterrupted until today, reinforced by the possibilities that data processing offers for the use of these sources. But although insightful analysis on the implementation and the use of field systems is found in a large number of local and regional works, national syntheses remain rare and partial, and European syntheses even more so. It is emblematic of the centrality of the text in relation to these maps that we know their conditions of production, circulation and use only when they are accompanying textual sources. The 1998 conference in Paris on land terrier and terrier maps, which undertook a European comparison centered on France, and the conference of 2003, dedicated to the cadastre and covering more closely and more homogeneously the whole continent, are characteristic of this approach.
From a different perspective, the history of cartography, which has been developing strongly for the last forty years, has also been interested in this type of source, even though smaller scale maps – globes, world maps and regional atlases – have generated more interest. From the 1990s onwards, works initiated in England, by Roger Kain, Elisabeth Baigent and David Buisseret, among others, put land-plot mapping at the center of research. They have tried to reconstruct the social conditions of its production and use, with particular emphasis on the sponsor-cartographer partnership. The development of land-plot mapping from the 1570s to the 1800s seems to be associated initially with the emergence of new methods of estate management, intimately connected to an integration into a market for agricultural products, and then to the progressive adoption of this tool by public authorities in their tax policies, despite the resistance it raised. The richness of the English archive materials, combined with the dynamic history of cartography across the Channel, have helped stimulate research in other places, but have also revealed the delays in some projects, and the fact that local initiatives remain disconnected.
The identification, the digitization and the online publishing of these maps has accelerated, and occupies archivists, curators, archaeologists and historians throughout Europe. These approaches, which are less and less isolated, have already stimulated exchanges and synthesis work on a continental scale, as in Pisa in 2016. But we cannot say as much about the historical analysis of these corpora, which are still largely underexploited. For the moment, many questions are only answered at the local or national level, whereas they concern processes that are visible across the continent and its colonial dominions. In addition to the fragmentary nature of academic traditions, the main difficulty for historians is to consider sources rooted in the variety of social, economic and political systems in the early modern period, which contrast with the normalization of state cadastral enterprises in the early 19th century. In addition, the legacy of old archival logic, with the arbitrary constitution of map collections isolated from their original documentary environment, often confronts the researcher with a silent corpus.
Our objective is to overcome these obstacles by engaging in a comparison of the reasons for production and social uses of rural land-plot maps during the Ancien Régime in a European and colonial context. The expression ‘rural land-plot map’ refers to any type of graphical representation of plots of land with the same crop and belonging to the same owner, in a socio-legal context where there is a superposition and a diversity of property rights. It excepts a priori urban plans, where mainly built lots are represented, but also the general cadastres established by states and based on equal taxation, such as those initiated under Napoleon in 1807 or Francis I of Austria in 1818. But it includes a very wide range of large-scale maps, produced for a variety of purposes – litigation, taxation, inventory for economic purposes, prestige operations, land consolidation, colonization – and for a variety of sponsors – ecclesiastical or secular lordships, States, village communities, single individuals – over a period of time from the 15th to the mid-19th century.
This conference will bring together researchers with a thorough knowledge of a large corpus of maps and capable of reflecting on the following four points, detailed in the attached questionnaire:
- Why were land plots mapped? (Sponsors, normativity of the map, legal value of surveying and cartographic production, theoretical uses)
- How were they made? (Techniques and cartographic vocabulary, visible authors and invisible authors, economic calculation of the cost of the map)
- What were their social, economic and cultural uses for contemporaries? (Legal value of the map, established uses, modifications and circulations, record keeping and obsolescence, map and perception of the space)
- What does the historian do with these maps and how does this justify the creation of his corpus of research (sources that are both cartographic and textual)? (Historiographic approach and regional or national academic tradition, nature of cartographic material for contemporaries, creation of research corpus, current uses)
The ultimate goal of the conference is the preparation of a synthetic publication, which will be published in partnership with the Presses Universitaires de Rennes and the Éditions Universitaires d’Avignon. The chapters of this book will not be the proceedings of the conference, but texts which will take into account the reformulations made to the initial research questions during the conference discussions. It will also include additional papers which will not be presented orally at the conference.
Submission guidelines
Abstracts of paper proposals must be sent by e-mail to the two organizers (3,500 characters maximum) as well as a brief CV (institutional affiliation, main publications) of one page, in the form of two PDF files,
before June 6, 2018.
The languages of the conference are French and English. The novelty and the richness of the proposed approaches, as well as the diversity of the geographical origins of the studied corpora, in order to cover the widest area possible, will be the main criteria for the selection of the papers for the conference and for the chapters of the final publication. Registration is free and the organizers will cover the accommodation costs.
The conference will be organized by the research centres CREAAH UMR 6566, University of Rennes 2) and CNE (UMR 8562, University of Avignon).
benjamin.landais@univ-avignon.fr, annie.antoine@univ-rennes2.fr
Scientific committee
- Annie Antoine, CREAAH - UMR 6566, Université de Rennes 2
- Benjamin Landais, Centre Norbert Elias - UMR 8562, Université d’Avignon
- Boris Deschanel, Centre Norbert Elias - UMR 8562, Université d’Avignon
- Nicolas Verdier, C.N.R.S. - UMR 8504, E.H.E.S.S.
- Florent Hautefeuille, Laboratoire TRACES - UMR 5608, Université Toulouse Jean Jaurès
- Guillaume Carré, EHESS, CRJ
- Tim Soens, professeur à l'université d'Anvers
Kategorien
- Geschichte (Hauptkategorie)
- Geographiscer Raum > Amerika
- Gesellschaft > Geschichte > Geschichte des ländlichen Raumes
- Zeitraum > Frühe Neuzeit
- Geographiscer Raum > Asien
- Geographiscer Raum > Europa
Orte
- Rennes, Frankreich (35)
Daten
- mercredi, 06. juin 2018
Schlüsselwörter
- plan parcellaire, histoire de la cartographie, histoire du paysage, cadastre, cartes anciennes, histoire rurale
Kontakt
- Annie Antoine
courriel : annie [dot] antoine [at] univ-rennes2 [dot] fr - Benjamin Landais
courriel : benjamin [dot] landais [at] univ-avignon [dot] fr
Informationsquelle
- Benjamin Landais
courriel : benjamin [dot] landais [at] univ-avignon [dot] fr
Zitierhinweise
« La cartographie parcellaire dans les campagnes d'Ancien Régime (Europe, Amériques, Asie), de la production aux usages », Beitragsaufruf, Calenda, Veröffentlicht am mercredi, 25. avril 2018, https://calenda-formation.labocleo.org/440529

