Página inicialFrontières religieuses, frontières mentales, frontières culturelles...

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Frontières religieuses, frontières mentales, frontières culturelles...

Religious boundaries, mental boundaries, cultural boundaries...

Les tracés confessionnels dans l'Europe moderne (début du XVIe – milieu du XVIIe siècles)

Confessional lines in modern Europe (early 16th - mid 17th centuries)

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Publicado mercredi, 17 de février de 2010

Resumo

Les frontières religieuses apparaissent comme une donnée incontournable de l’administration des communautés et des territoires dans l’Europe des XVIe et XVIIe siècles. À partir des travaux récents, consacrés aux modes de coexistence à l’époque des Réformes, notre table ronde souhaite étudier les manifestations et les fonctions (visibles ou non) de ces lignes de démarcation confessionnelles, issues des critères de distinctions, imposés par les institutions ou façonnés par les représentations des fidèles. Les interventions aborderont différents territoires (France, Saint-Empire et Europe orientale) et varieront les échelles d’analyse afin de proposer des éléments de définition et des typologies destinées à mieux saisir cette notion.

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L’histoire des courants et des institutions religieuses du long « siècle des réformes » reste encore largement marquée par les suites des débats sur le concept de confessionnalisation, forgé à partir de l’exemple du Saint-Empire. L’aboutissement de ce processus serait les clauses des Traités de Westphalie de 1648, responsables d’un redécoupage de la carte européenne. L’établissement de nouvelles frontières à la fois entre les États, les communautés et les individus - par des comportements et des représentations réciproques différents - se trouve au cœur de ce phénomène.

Pourtant, les nombreux travaux consacrés aux « frontières religieuses », comprises comme une institutionnalisation de la différence, préfèrent évoquer la manière dont celles-ci étaient perçues et traitées localement dans les zones de contact, sans s’attacher véritablement à la définition de ces frontières en elles-mêmes. Ces dernières ne vont pas de soi car, contrairement aux tracés administratifs, elles ne s’incarnent que rarement  dans un territoire. Elles apparaissent davantage comme le constat d’un phénomène évident et, dans le même temps, flou car difficilement saisissable par la documentation. Les études récentes sur la coexistence des communautés des fidèles, dans diverses régions de l’Europe, montrent avec finesse la complexité et la variété des expériences de vie dans les espaces pluriconfessionnels et contestent une vision trop rigide des démarcations religieuses. Ainsi, la différentiation se révèle comme un enchevêtrement d’imaginaires et de regards respectifs, qui dépassent de loin la simple division des Églises. Toutefois, là encore, cette frontière se dessine par défaut, dans ce qui apparait comme la comparaison de deux cultures confessionnelles concurrentes. Dans cette confrontation des traductions locales des discours chrétiens (catholique, protestant et orthodoxe), juif ou musulman, produits par les autorités religieuses reconnues et mis les uns face aux autres, le terme de frontière sert généralement de présupposé et cache en réalité des notions telles que la violence, le conflit, le dialogue ou l’ignorance mutuelle.

L’ouvrage de Keith P. Luria, Sacred Boundaries : Religious Coexistence and Conflict in Early-Modern France (Washington D.C., The Catholic University of America Press, 2005) est l’une des premières tentatives de s’interroger sur la nature de cette ligne de démarcation, souvent immatérielle mais parfois ancrée dans le paysage, entre les catholiques et les protestants du Poitou. À défaut de pouvoir donner une définition exhaustive de ce qu’il appelle « les frontières du sacré », l’auteur propose une typologie qui distingue trois modes de séparation : une frontière largement perméable où les pratiques sociales communes l’emportaient sur l’affirmation des appartenances confessionnelles, une coexistence mutuellement tolérée malgré des identités bien marquées et, enfin, le conflit poussant à l’exclusion du groupe minoritaire puis, à terme, à son effacement par l’intégration à la communauté des fidèles dominante. Chacun de ces modes d’instituer ou de refuser la différence dépendent fortement du contexte du moment et du cadre politique régional. Pierre Chaunu l’avait déjà bien montré pour le cas du jansénisme en Lorraine, devenue à la fin du xvie siècle une marge de la Réforme tridentine face aux États protestants du Saint-Empire. Aussi, l’approche adoptée par Keith P. Luria suggère la possibilité d’appréhender les frontières en religion à l’exemple des frontières politiques ou institutionnelles, à condition de tenir compte au préalable de certaines caractéristiques particulières. La principale d’entre elles vient des rôles opposés, joués par cette « ligne » dans les divisions politiques et religieuses. Alors que les forces des États sont tournées avant tout vers la protection de leurs contours contre une invasion extérieure, et bien moins souvent vers le contrôle du trafic venu de l’intérieur, les institutions religieuses s’attachent en priorité à contrôler les membres de leur propre communauté afin de veiller à leur maintien dans la « vraie foi ». La frontière religieuse devient alors l’un des moyens de renforcer la cohésion interne du groupe. La seconde particularité est la multiplicité de ces démarcations. Puisque les frontières religieuses ne recoupent que très imparfaitement les divisions territoriales, elles sont retracées et renégociées sans cesse à chaque échelle considérée. Cet aspect a été bien mis en lumière dans les Actes du xxxie colloque international des études humanistes, consacré aux frontières religieuses.

Toutefois, contrairement aux études mentionnées, nous souhaiterions moins observer le face-à-face entre les communautés des fidèles que suivre le tracé même de la frontière, là où il se manifestait au grand jour ou, au contraire, disparaissait derrière la trame des autres pratiques sociales, afin de saisir le rôle des divers facteurs composant les identités religieuses. En effet, la séparation plus ou moins acceptée et visible pouvait naître dans une famille dont les époux pratiquaient deux cultes différents, apparaître dans les quartiers d’une cité, structurés autour de lieux de cultes ou d’activités confessionnellement marquées, ou encore servir à fixer les frontières entre les États voisins. De même, les cas de coexistence pacifique et le dialogue ne signifiaient pas toujours un effacement complet de la frontière mais son déplacement ponctuel ou son extrême perméabilité, généralement éphémère. Ainsi, certaines questions communes issues de la grille d’analyse des divisions administratives restent pertinentes pour comprendre la nature et la fonction des lignes religieuses. En particulier, que divisaient ces frontières ? Les dogmes et les usages cultuels dans les discours de controverse, les statuts des individus dans les pratiques politiques, parfois l’espace lui-même, de manière brève ou permanente, dans les pratiques sociales quotidiennes. Cette liste est loin d’être exhaustive et devra être discutée et complétée par les participants.

À partir de cette problématique, la table ronde propose de s’interroger sur la nature, les manifestations et les fonctions des frontières entre les communautés des fidèles de l’Europe des xvie-xviie. L’approche choisie tentera de mettre en évidence les particularités de ces processus entre les débuts des divisions de la chrétienté latine et le moment où ces découpages finissent par être assimilés – en vue de la dénonciation ou de la légitimation – dans la pratique et le langage politiques et religieux. De même, les communications s’attacheront volontairement à présenter, à des échelles variées, un tableau comparé des différents espaces européens, à travers les questions suivantes :

  • Quels sont les modes de construction d’une nouvelle frontière, à l’origine de la division communautaire, dans l’opposition ou le consentement des anciennes institutions religieuses (rythmes et contextes régionaux) ?
  • Quels sont les acteurs qui établissent et préservent ces frontières, en fonction de l’échelle et du territoire considérés ?
  • Quelles sont les manifestations d’une frontière religieuse qui marquent l’appartenance des individus (pratiques cultuelles, habits choisis ou imposés, documents) ?
  • Comment et pour quels raisons revendiquées ou dissimulées franchit-on cette frontière ?
  • Comment cette frontière est-elle utilisée et négociée par les communautés en présence ?

Programme de la journée :

9h30 : Introduction

9h50 : Les frontières religieuses dans l'Allemagne moderne: ségrégation et osmose. Étienne François (Freie Universität von Berlin)

10h15 : Devenir protestant, passer à l’Union, rester orthodoxe : dimensions explicites et cachées des frontières confessionnelles en territoire polonais et ruthène (milieu du xvie - début du xviie siècle). Mikhail Dmitriev (Université d’État de Moscou/Central European University)

10h40 – 10h55 : Pause. 

10h55 : La rue juive des villes polonaises des xvie et xviie siècles : quartier ou ghetto ? Daniel Tollet (Université Paris IV)

11h20 : Discussion. 

12h-14h : Pause 

14h : Choix religieux et dynamiques locales, le cas du Rouergue au milieu du xvie siècle. Nicole Lemaître (Université Paris 1) 

14h25 : Administrer et distinguer : paroisses latines et fidèles ruthènes dans la grande-principauté de Lituanie (première moitié du xviie siècle). Laurent Tatarenko (Université Paris 1/Université catholique de Lublin)

14h50 : Paroisses et vie paroissiale dans la métropolie de Kiev (xvie-xviie siècles). Leonid Timochenko (Université de Drohobyč)

15h15 : Vivre ensemble, croire séparément ? Religions et confessions dans la région de Lublin et de Chełm à l'époque moderne. Hubert Łaszkiewicz (Université catholique de Lublin)

15h40-16h30 : Discussion et conclusions de la journée

Locais

  • La Sorbonne - Bibliothèque du CRHM (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne) Escalier R (2e étage), 17 rue de la Sorbonne
    Paris, França

Datas

  • vendredi, 12 de mars de 2010

Ficheiros anexos

Palavras-chave

  • frontières, réformes religieuses, vie paroissiale, coexistence

Contactos

  • Laurent Tatarenko
    courriel : tatarenko [dot] laurent [at] neuf [dot] fr

Fonte da informação

  • Laurent Tatarenko
    courriel : tatarenko [dot] laurent [at] neuf [dot] fr

Para citar este anúncio

« Frontières religieuses, frontières mentales, frontières culturelles... », Jornadas, Calenda, Publicado mercredi, 17 de février de 2010, https://calenda-formation.labocleo.org/200279

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