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La mort sous les yeux ? La mort dans tous ses états à la charnière du XXIe siècle
Death under our very eyes Figures of death at the turn of the xxi th century
Publié le vendredi 26 octobre 2012
Résumé
Annonce
La mort sous les yeux ? La mort dans tous ses états à la charnière du XXIe siècle, dans le cadre du Colloque international de l’Institut des Amériques (pôle Nord-Est), Université Lille 3, les 14, 15 et 16 novembre 2013, Centre d’Études en Civilisations, Langues et Lettres Étrangères / CECILLE, EA 4074
Comité scientifique
- Isabelle Boof-Vermesse (CECILLE / Lille 3) ;
- Dorothée Chouitem (CECILLE / Lille 3) ;
- Cathy Fourez (CECILLE / Lille 3) ;
- Victor Martinez (ALITHILA / Lille 3)
- Lucía Melgar (Instituto Tecnológico Autónomo de México) ;
- Marie-Agnès Palaisi-Robert (IRIEC / Toulouse II-Le mirail);
- Maryse Petit (CECILLE / Lille 3) ;
- Ana Rodríguez (Lille 3) ;
- Luca Salza (CECILLE / Lille 3)
Argumentaire
Qu’elle soit lente, brutale, fortuite, sensationnelle, barbare, burlesque, scandaleuse, douloureuse, et même célébrée, la mort se trouve au coeur de la vie. Toutefois, la singulière violence avec laquelle elle s’est imposée au cours du XXe siècle - corroborée par certains progrès scientifiques et technologiques destinés non pas au bien-être de l’humain mais au contraire à sa destruction totale sans la mémoire de son passage ni de sa trace - ainsi que le caractère déchaîné et déformé qu’elle a pris en cette première décennie du XXIe siècle - notamment dans la commercialisation excessive du « montrer et exhumer la mort », et ce sous ses aspects les plus terrifiants, dans l’inclémence de l’atrocité de pays ravagés par l’injonction de la haine de l’autre où la mort perd son caractère solennel et où il est permis que des corps faits guenilles deviennent des messages organiques du pouvoir de la force et de la cruelle démesure -, nous incitent à relire la mort, qui ne semble plus être, comme le commentait Heidegger, « le lieu de mon irremplaçabilité1 ».
Les nouveaux moyens de communication de diffusion de l’actualité, de captation rapide et propagation quasi instantanée de l’image, - dans un contexte économique de production à outrance qui facilite, entre autres, l’accès aux armes, la préparation « artisanale » d’une tuerie, la création de nouveaux virus - ont donné une nouvelle plasticité à la mort. Elle est désormais saisie depuis son caractère le plus éphémère, le plus inconsistant, le plus fluctuant, le plus innommable, surfe sur les écrans, déboule à tout moment et sans pudeur sur le Pad ou le téléphone portable. Elle incarne le monstrum (monstre), qui signifiait en latin «ce qui attire», « ce qui fascine », mais aussi « ce qu’il faut montrer2 ».
À force d’exhiber la mort dans ses variations insoutenables – qu’elle soit causée par une catastrophe naturelle, un conflit armé, l’oeuvre d’un détraqué, voire même une maladie - comme une bête de cirque, sans véritablement en questionner les causes et les effets, sans la respecter, en la masquant sous des chiffres et des sondages qui la dépersonnalisent, en lui effaçant tout visage, toute identité dans une captivante impudeur voyeuriste, en l’oubliant aussi vite qu’elle n’est survenue, en banalisant sa facette « mort spectacle3 », il s’avère alors difficile de rallier, nous, les individus dans la perception de l’affliction, de fomenter la volonté de nous inclure dans la mort d’autrui, et surtout d’évaluer la place de la mort dans notre vie, et donc d’évaluer notre humanité.
- Comment représenter l’immobilité qu’incarne en théorie la mort dans un monde où tout bouge, où tout devient mobile, instable, transformable, interchangeable ? Comment redonner sens et sonorité à la mort, fruit de l’abjection et de la cruauté, lorsque cette même mort fait partie du paysage de la vie et est immergée dans une quotidienneté de l’extrême ?
- Comment visualiser, identifier, exprimer, manifester la mort lorsque le corps du défunt a été mis en pièces jusqu’à la défiguration ?
- Que signifie le droit à la vie lorsque « tuer » constitue un projet de vie ?
- Comment annoncer et dire la mort inacceptable sans la « normaliser » ?
- Pourquoi la mort de certains êtres humains importe et de beaucoup d’autres, non ?
- Comment recréer l’écart entre la vie et la mort, recréer peut-être la stupeur, l’effroi, le recueillement collectif ?
- N’assisterions-nous pas, au sein de la fiction (littéraire, télévisée…), à une exposition surabondante, voire démesurée, de la mort avec la sensation pour le récepteur d’être familiarisée avec elle, et même de l’apprivoiser, de la contrôler ?
- Comment doit-on montrer la mort ? Pourquoi certaines morts sont « spectacularisées » depuis une toile de fond aseptisée et un regard clinique et d’autres sont exhibées dans leur versant le plus morbide et repoussant ?
- Est-il possible de tourner en dérision, de parodier, d’ironiser ce que l’historien Paul Ardenne nomme « le mourir anormal4 » ?
Le Laboratoire CECILLE (Centre d’Études en Civilisations, Langues et Lettres Étrangères / CECILLE, EA 4074) de l’Université des Sciences Humaine et Sociales / Charles de Gaulle- Lille3 propose donc, et depuis une perspective interdisciplinaire, de mener une lecture sur « La mort sous les yeux ? La mort dans tous ses états à la charnière du XXIe siècle ». Ce symposium s’inscrira dans le cadre du Colloque international « Les Amériques au fil du devenir : Territoires traversés, espaces inventés » organisé par l’Institut des Amériques (pôle Nord-Est), Norah Dei Cas et Bruno Monfort (Centre d’Études en Civilisations, Langues et Lettres Étrangères / CECILLE, EA 4074) à l’Université des Sciences Humaines et Sociales / Charles de Gaulle-Lille 3. À cette occasion sera exposée, avec la participation du Service Action Culture de Lille 3, une série de vingt toiles inédites du peintre mexicain Carlos Maciel Kijano intitulée « Alegoría de la muerte y otras sutilezas de la vida o el carnaval de la muerte ».
Propositions
Toutes les propositions de communication (200 à 300 mots) ainsi qu’un bref curriculum vitae de l’auteur devront être envoyées au plus tard le 31 octobre par courriel aux adresses suivantes : dorothee.chouitem@univ-lille3.fr et cathy.fourez@univ-lille3.fr et seront soumises à l’évaluation du Comité scientifique du colloque.
Frais d’inscription au colloque : 100 euros.
Pour plus d’information : jean-francois.delcroix@univ-lille3.fr
Notes
- 1 Cité par Jacques Derrida, in Donner la mort, Éditions Galilée, Paris, 1999, p. 64.
- 2 Pierre Péju, Le monstrueux, Giboulées / Gallimard Jeunesse, Paris, 2007, p. 16-17.
- 3 Cette formulation est le titre d’un ouvrage de Michela Marzano, La mort spectacle : Enquête sur l’ « horreur réalité », Éditions Gallimard, Paris, 2007.
- 4 Paul Ardenne, Extrême. Esthétiques de la limite dépassée, Éditions Flammarion, Paris, 2006
Death under our very eyes. Figures of death at the turn of the xxi th century
IdA (Institut des Amériques) International Convention, North East Chapter, Lille 3 University, November 14-16, 2013
Comité scientifique :
- Isabelle Boof-Vermesse (CECILLE / Lille 3) ;
- Dorothée Chouitem (CECILLE / Lille 3) ;
- Cathy Fourez (CECILLE / Lille 3) ;
- Victor Martinez (ALITHILA / Lille 3)
- Lucía Melgar (Instituto Tecnológico Autónomo de México) ;
- Marie-Agnès Palaisi-Robert (IRIEC / Toulouse II-Le mirail);
- Maryse Petit (CECILLE / Lille 3) ;
- Ana Rodríguez (Lille 3) ;
- Luca Salza (CECILLE / Lille 3)
Argument
Whatever its aspects, be it slow, brutal, random, sensational, barbarous, burlesque, scandalous, painful, or even celebrated, death lies at the heart of life. Yet the singular violence with which it imposed its presence throughout the 20th century, with the help of scientific and technological progress whose aim was not humanity’s welfare but on the contrary its total destruction down to the faintest memories or traces of its very existence, together with the frenzied and twisted character it has come to assume in the first decade of the 21st century, as seen in the commodification of the “exhibiting and excavating of death” at its most terrifying, in the ruthless atrocity displayed in countries consummated by the injunction to hate the other, where death has lost its solemn dimension and where bodies turned into rags are allowed to become organic messages that speak of the power of force and of the cruelty of hubris, all those manifestations invite us to reassess death, non longer what Heidegger called “the place of the irreplaceable uniqueness of the person1”.
New means of communication and broadcasting, capturing and spreading images almost simultaneously, in a context of mass production giving access to, among other things, weapons, components to prepare “home-made” killings, new viruses, have made death more plastic than ever. Now death is approached in its most fugacious, insubstantial, abject aspect, it floats on the screens, irrupts any time on your iPad or your mobile. It embodies the monstrum (monster) which also means in Latin “what attracts your attention”, “what holds your attention”, “what must be shown2”.
Death has been exhibited in all its unbearable variations, whether caused by a natural disaster, war, serial killers, or even disease, as if it was some freak show. Its causes and effects are never examined, its nature is never considered; instead, death is veiled under facts and figures, surveys that dehumanize it, erase its uniqueness, or drown its identity in a captivating voyeuristic scrutiny, forgetting about it as quickly as it happens, trivializing it and turning it into a “death spectacle3”. It then becomes difficult for us to meet other individuals in the perception of pain, to muster the will to include ourselves in the death of the other, to assess the place death holds in our lives and thus assess our own humanity.
- How to represent the motionlessness that death stands for in a world that is constantly on the move, a world animated by constant locomotion, an unstable, transformable, interchangeable world ?
- How to restore meaning and sound to death, the result of abjection and cruelty, when this death belongs to our lifescape and is submerged in the dailiness of the extreme?
- How to visualize, identify, express, make manifest death when the body of the deceased has been torn to pieces beyond recognition?
- What can the right to live mean when killing is what one wants to do with one’s life?
- How to announce and tell about unacceptable death without contributing to its trivialization?
- Why is some people’s death important and other people’s not?
- How to recreate the gap between life and death, possibly rediscover stupor, dread, the capacity to grieve together?
- Aren’t we experiencing a form of overexposure to death within fiction (literature, TV shows..) which makes it look familiar, tame, under control?
- How should death be shown ? Why does the dramatization of death sometimes involve a clinical gaze and a sanitized environment and other times paroxysmic morbidity and ugliness?
- Is there a way to deride, to parody, to ironize what historian Paul Ardenne calls “abnormal dying4” ?
Submissions
Toutes les propositions de communication (200 à 300 mots) ainsi qu’un bref curriculum vitae de l’auteur devront être envoyées au plus tard le 31 octobre par courriel aux adresses suivantes : dorothee.chouitem@univ-lille3.fr et cathy.fourez@univ-lille3.fr et seront soumises à l’évaluation du Comité scientifique du colloque.
Frais d’inscription au colloque : 100 euros.
Pour plus d’information : jean-francois.delcroix@univ-lille3.fr
- 1 Cité par Jacques Derrida, in Donner la mort, Éditions Galilée, Paris, 1999, p. 64.
- 2 Pierre Péju, Le monstrueux, Giboulées / Gallimard Jeunesse, Paris, 2007, p. 16-17.
- 3 Cette formulation est le titre d’un ouvrage de Michela Marzano, La mort spectacle : Enquête sur l’ « horreur réalité », Éditions Gallimard, Paris, 2007.
- 4 Paul Ardenne, Extrême. Esthétiques de la limite dépassée, Éditions Flammarion, Paris, 2006.
Catégories
- Époque contemporaine (Catégorie principale)
- Périodes > Époque contemporaine > XXe siècle > 1989 à de nos jours
- Esprit et Langage > Pensée
- Esprit et Langage > Représentations > Histoire culturelle
- Périodes > Époque contemporaine > XXe siècle
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Lieux
- Bâtiment F (Maison de la Recherche) - Université Sciences humaines et sociales - Lille3
Villeneuve-d'Ascq, France (59)
Dates
- mercredi 31 octobre 2012
Mots-clés
- mort, perception de la mort, médias
Contacts
- Jean-François Delcroix
courriel : jean-francois [dot] delcroix [at] univ-lille3 [dot] fr
URLS de référence
Source de l'information
- Jean-François Delcroix
courriel : jean-francois [dot] delcroix [at] univ-lille3 [dot] fr
Licence
Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la CC0 1.0 Universel.
Pour citer cette annonce
« La mort sous les yeux ? La mort dans tous ses états à la charnière du XXIe siècle », Appel à contribution, Calenda, Publié le vendredi 26 octobre 2012, https://calenda-formation.labocleo.org/225189