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Le corps des émotions
The body of emotions
À propos de la performativité des émotions dans l’histoire
About the performativity of emotion in history
Veröffentlicht am lundi, 05. mai 2014
Zusammenfassung
En prenant pour point de départ la métaphore du corps, ce colloque veut faire émerger de nouvelles possibilités d’étude de la performativité historique des émotions, comprises comme des agents donnant du sens aux corps, que ceux-ci soient physiques, sociaux, politiques, artistiques ou littéraires. Ainsi, l’expression « corps émotionnel » peut être considérée comme une catégorie analytique permettant de comprendre comment différentes conceptions historiques des émotions, ainsi que les pratiques et les objets qui leur sont associés, ont produit des systèmes de relations physiques et symboliques qui peuvent être compris comme des corps, dans une optique multidisciplinaire.
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Argumentaire
L’idée du corps comme lieu d’expression des émotions n’est pas neuve dans la culture occidentale. La peur se manifeste par le tremblement, la gêne par le rougissement et l’amour par l’accélération du rythme cardiaque et par une respiration irrégulière. On ne peut pour autant pas postuler l’existence d’une relation naturelle entre les émotions et leurs traductions corporelles. Par exemple, alors qu’à l’époque moderne les passions sont considérées comme l’expression des mouvements de l’âme autant que comme de puissantes entités agissant sur les corps par la santé et la maladie, les physiologistes et psychologues de la fin du dix-neuvième et du début du vingtième siècle, affirment que le corps matériel est le résultat “des émotions immédiates et locales produites dans le laboratoire” (Dror, 1998). Dans cette perspective historique, les relations entre corps et émotions semblent loin d’être universelles, apparaissant socialement et institutionnellement produites dans des contextes historiques spécifiques.
Ce colloque de trois jours veut remettre en cause l’idée que les émotions correspondent invariablement à certaines expressions corporelles, en montrant qu’elles peuvent être comprises comme des pratiques culturelles ayant le pouvoir affectif de transformer la réalité en créant des “corps émotionnels”. D’un côté, le corps sera envisagé comme un medium expressif permettant de “négocier les frontières et les intersections entre soi et la société” (Porter, 2001). La flexibilité de ces frontières sera comprise en lien avec les évolutions des normes sociales, des codes culturels et des institutions, et plus spécialement comme le résultat du travail des émotions. De l’autre, nous proposons une approche des émotions comme pratiques culturelles qui font/produisent quelque chose. Cette performativité des émotions a été soulignée par des spécialistes de l’histoire de la Révolution française (Reddy, 1997; 2001), de l’histoire de la médecine (Bound-Alberti, 2006), de théorie politique (Ahmed, 2004) et de théorie littéraire (Labanyi, 2010) comme étant l’une des perspectives de recherche les plus prometteuses en histoire des émotions.
En prenant pour point de départ la métaphore du corps, ce colloque veut faire émerger de nouvelles possibilités d’étude de la performativité historique des émotions, comprises comme des agents donnant du sens aux corps, que ceux-ci soient physiques, sociaux, politiques, artistiques ou littéraires. Ainsi, l’expression “corps émotionnel” peut être considérée comme une catégorie analytique permettant de comprendre comment différentes conceptions historiques des émotions (par exemple, les sentiments, les passions, les affects, les sensations), ainsi que les pratiques et les objets qui leur sont associés, ont produit des systèmes de relations physiques et symboliques qui peuvent être compris comme des corps, dans une optique multidisciplinaire. Cet appel invite à se pencher, sans restriction chronologique, sur un des axes suivants, portant respectivement sur la production de “corps” scientifiques, socio-politiques et artistiques :
La production de “corps émotionnels” dans les sciences. L’observation, l’expérimentation et le diagnostic ont été utilisés dans l’histoire comme techniques de standardisation scientifique pour définir le corps aux prises avec l’amour, la douleur et le plaisir. Les passions ont ainsi été identifiées depuis Aristote comme de puissants agents formant les physionomies humaines et animales. Plus particulièrement, alors que le corps amoureux est défini dans la médecine antique par la mesure du pouls et la rougeur du visage (Esquirol, 1845), il sera conceptualisé au XXe siècle dans les termes de sécrétion d’adrénaline et d’excitation (Dror, 2011). On se demandera ainsi de quelles manières les pratiques scientifiques ont normalisé les expressions émotionnelles à travers l’histoire. Les émotions des scientifiques ont-elles affecté leur travail en hôpital ou en laboratoire? Comment les émotions de corps non-parlants, tels que ceux des nourrissons ou des animaux, ont-ils été catégorisés? Les approches scientifiques des émotions ont-elles pénétré dans la culture populaire à travers le roman, le théâtre, la photographie ou le cinéma? Les contributions tenteront ainsi de déterminer dans quelle mesure la production scientifique des émotions a eu un impact dans la compréhension des corps dans la vie quotidienne.
Les émotions comme lieux d’échange social et de changement politique. Des politiques de la peur étudiées par Joanna Bourke aux analyses de l’indignation d’Anne-Claude Ambroise-Rendu et Christian Delaporte, en passant par le travail mené par Sara Ahmed sur le bonheur, la dimension collective des émotions a été soulignée comme un possible lieu d’activisme social et de changement politique. Y a-t-il des connections entre l’émergence de styles émotionnels et la production de “corps révolutionnaires”? De quelle sorte de matériaux et de sources a-t-on besoin pour reconstruire les émotions de la foule? La performance d’émotions différentes a-t-elle contribué à définir de nouveaux corps, tels que ceux défendus par les mouvements féministes, anti-rascistes et queer? Ce panel s’intéressera à la possibilité de créer de nouveaux corps sociaux et politiques par la performance d’émotions collectives.
Le pouvoir affectif de la littérature, de la photographie et du cinéma. La recherche a identifié un affective turn en littérature et en photographie, marquant un intérêt pour ce que font et produisent les textes, plutôt que pour ce qu’ils signifient (Labanyi, 2010; Edwards, 2012; Bouju and Gefen, 2012). Par exemple, un grand nombre de romans, photographies et films de guerre mobilisent l’empathie et créent ainsi une “sensibilité humanitaire” (Taithe, 2006). Le cas récent d’Indignez-vous! de Stéphane Hessel montre que les émotions peuvent également engager à l’action sociale et politique. Dans quel(s) sens comprendre la performativité des émotions esthétiques? Quel rôle jouent-elles dans la création de régimes émotionnels de plus grande ampleur (par exemple, la mobilisation de l’empathie, de la compassion ou de la pitié dans l’actuel développement de la figure victimaire) ? Les livres, les photographies ou les films peuvent-ils être considérés comme des « objets affectifs » produits par notre engagement haptique ou sensoriel à leur égard ? Cet axe explorera les différentes manières dont ces objets artistiques peuvent être interprétés comme des corps émotionnels dans des contextes historiques spécifiques.
Modalités de proposition
Les propositions de communication de 300 mots maximum (correspondant à 20 minutes de présentation), seront envoyées avant le 1er juillet 2014 à l’adresse : emotionalbodies@gmail.com
Comité organisateur
- Dolores Martín Moruno (Université de Genève, Institut Éthique Histoire Humanités)
- Sophie Milquet (Université de Lausanne, Section de français)
- Beatriz Pichel (Université De Montfort, Leicester, Photographic History Research Centre)
Auditoire Louis Jeantet, Route de Florissant, Genève, Suisse.
20-22 octobre 2014
Kategorien
- Geschichte (Hauptkategorie)
- Gesellschaft > Studien zur Wissenschaft > Geschichte der Wissenschaften
- Erkenntnis > Darstellung > Kulturgeschichte
- Gesellschaft > Politikwissenschaften > Politikgeschichte
- Erkenntnis > Geistesgeschichte > Geistesgeschichte
- Erkenntnis > Sprachwissenschaften > Literaturwissenschaft
- Erkenntnis > Darstellung > Visuelle Studien
- Gesellschaft > Geschichte > Sozialgeschichte
Orte
- Route de Florissant
Genf, Schweiz (1211)
Daten
- mardi, 01. juillet 2014
Schlüsselwörter
- emotions, corps, histoire de la médecine, changement social, émotions, esthétiques
Kontakt
- Sophie Milquet
courriel : smilquet [at] ulb [dot] ac [dot] be
Informationsquelle
- Sophie Milquet
courriel : smilquet [at] ulb [dot] ac [dot] be
Zitierhinweise
« Le corps des émotions », Beitragsaufruf, Calenda, Veröffentlicht am lundi, 05. mai 2014, https://calenda-formation.labocleo.org/285582