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Calenda - Le calendrier des lettres et sciences humaines et sociales

L'école et les langues dans les espaces en situation de partage linguistique à travers l’histoire

Schools and languages in areas faced with linguistic division throughout history

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Veröffentlicht am vendredi, 18. septembre 2015

Zusammenfassung

À plusieurs reprises dans l'histoire, il s'est trouvé une situation où, sur un même espace, cohabitaient plusieurs pratiques linguistiques, distribuées en fonction des strates de la société mais aussi des usages sociaux et des situations de communication. Depuis le début de l’époque moderne, l’Eglise, les Etats en construction et diverses situations de sujétion ont joué un rôle dans l’évolution de ces pratiques partagées. Dans une approche historique, ce colloque voudrait aborder la question du rôle de l’école dans ces situations de coexistence, voire de conflit linguistique. Quels sont les rapports entre ces langues à l’intérieur de l’école, les méthodes pédagogiques employées pour promouvoir les unes et refouler les autres, quels compromis sont parfois trouvés ? Quel statut donne à une langue le fait d’être promue, imposée, reconnue, tolérée à l’école ? Mais quelles sont aussi les limites de ces effets ?

Many times throughout history, the situation has occurred in which different linguistic practices share the same physical space. These practices differ according to social strata as well as social usage and type of interaction. Western Brittany has certainly found itself in this situation, even in the 20th century, when, according to Pierre Jakez Hélias’ account, the Breton language reigned supreme in villages, on the street, in businesses and the church, while French was limited to schools and interactions between the city and public institutions.

Inserat

Argumentaire

À plusieurs reprises dans l'histoire, il s'est trouvé une situation où, sur un même espace, cohabitaient plusieurs pratiques linguistiques, distribuées en fonction des strates de la société mais aussi des usages sociaux et des situations de communication. La Bretagne occidentale a bien connu cette configuration, encore au XXe siècle lorsque, selon le témoignage de Pierre Jakez Hélias, le breton régnait partout au village, dans la rue, les commerces et à l'église tandis que le français se cantonnait à l'école et aux échanges avec le monde de la ville et les institutions publiques.

Mais il ne faudrait pas réduire ces situations aux provinces excentrées à fort particularisme linguistique. Le patois des ruraux dans Molière est un ressort du rire pour des urbains qui évoluent dans un autre univers linguistique à seulement quelques lieues de là. Et à son époque s'intercalait aussi une langue tierce, à la fois morte et vivante, qui était l'apanage et l'objet d'études assidues des élites pendant une partie de leur scolarité. Il s'agit bien sûr du latin, qui a eu ailleurs en Europe et dans certaines institutions globales une longévité plus grande qu’en France en tant que langue de communication administrative et intellectuelle. Le père Julien Maunoir, jésuite issu de la Haute Bretagne francophone en poste au collège de Quimper au XVIIe siècle, utilisait trois langues adaptées à différents contextes de communication : le français pour la communication ordinaire en ville ou soutenue avec les élites, le latin pour l'enseignement et certaines occasions de l’administration de son ordre, et la langue populaire, ici le breton, pour pouvoir évangéliser les paysans des campagnes lors de ses missions.

 Si l’Eglise a reconnu la nécessité de parler la langue de ses ouailles, les Etats-nations en construction ont souvent eu la tentation d’imposer l’uniformité linguistique. La « Politique de la langue » initiée par la Révolution française a considéré les « patois » comme des obstacles à l’extension de la République et a voulu les éradiquer, notamment par l’école[1]. Reste à mesurer les effets réels et les modalités de cette politique sur le terrain. Et, au-delà même de toute politique volontariste se pose la question du rôle de  l’école dans ces situations de coexistence, voire de conflit linguistique.

On voudrait cependant ne pas s’intéresser seulement aux oppositions entre groupes linguistiques nettement différenciés (telles français/breton, allemand/tchèque) mais plus largement à celles qui existent entre des variantes élevées et populaires dans le même groupe linguistique. La notion de dialecte, telle qu’elle est plus communément utilisée dans les pays germaniques, est ici sans doute plus largement opératoire que celle de patois. De nombreuses variations sont possibles sur ce thème : langue des élites contre langue du peuple, langue des villes contre langue des campagnes, langue du pouvoir contre langue des dominés, langue savante contre langue vulgaire, langues autochtones contre langue de l'occupant ou du colonisateur. Il convient aussi d’envisager le problème différemment en fonction des niveaux d’éducation, de l’école élémentaire jusqu’à l’université.

Les questions que nous voudrions poser à propos de cette thématique sont particulièrement celles-ci :

  1. De quel rôle linguistique est investie l’école ? Celui-ci dépend évidemment du contexte, qui a varié dans l’espace et le temps, et aussi des niveaux d’étude. Selon ces paramètres, il peut s’agir à l’école de donner les éléments de la langue élevée, de l’administration, de la littérature, de la cohésion nationale, avec ce que cela suppose parfois aussi de charge idéologique : langue de la Révolution, de la Patrie, du Socialisme, langue de la religion (arabe littéraire en terre d’islam ou latin en pays catholique).
  2. Quels sont les rapports entre ces langues à l’intérieur de l’école, les modalités de partage ou d’exclusion ?
  3. Quelles sont les méthodes pédagogiques employées pour amener une population scolaire d’une langue maternelle à une langue officielle ? Quelles méthodes sont employées au contraire pour le refoulement de la langue maternelle (punitions, vexations, stigmatisation par le « symbole ») ; mais aussi quels sont les compromis passés sur les usages, les aménagements à la règle ?
  4. Quel statut donne à une langue le fait d’être promue, imposée, reconnue, tolérée à l’école ? Ceci concerne aussi les langues étrangères dès lors qu’elles sont vecteurs de nouveaux modèles culturels distinctifs d’une élite, qui les pratique véritablement comme langue de communication interne au groupe : par exemple successivement l’italien, l’espagnol, le français, l’anglais dans la noblesse et la haute société, au moins dans certaines parties de l’Europe.
  5. Quelles sont les limites de ces effets ? N’y-a-t-il pas parfois survalorisation du rôle de la forme institutionnelle scolaire dans l’évolution des pratiques linguistiques, en particulier populaires ? L’école peut-elle changer durablement les usages linguistiques, voire sauver une langue ?

[1] Michel de Certeau, Domiique Julia, Jacques Revel, Une politique de la langue: la Révolution française et les patois : l'enquête de Grégoire, 1975, rééd. augmentée Paris : Gallimard, 2002.

[2] The “symbole” was an item (a clog, a skittle) given to a child when caught speaking his/her native language

Modalités de soumission

Échéance de remise des propositions de communication : 30 septembre 2015

Fournir un titre, un descriptif du projet de communication de 1500 à 3000 signes ainsi que quelques éléments bio-bibliographiques (position institutionnelle, spécialité(s), et quelques publications en rapport avec le sujet ou le domaine)

Adresse d'envoi : Jean-Luc.LeCam@univ-brest.fr

Organisation

Colloque organisé par le CRBC (Centre de Recherche Bretonne et Celtique, EA 4451) avec l’appui de l’ATRHE (Association transdisciplinaire pour les recherches historiques sur l’éducation)

Responsable

Jean-Luc Le Cam, maître de conférences d’histoire moderne

Jean-Luc.LeCam@univ-brest.fr

Comité scientifique

  • Nelly Blanchard, Celtique, Université de Bretagne Occidentale, Brest
  • Jean-Luc Le Cam, Histoire moderne, Université de Bretagne Occidentale, Brest
  • Erwan Le Pipec, Sociolinguistique, Université de Bretagne Occidentale, Brest
  • Youenn Michel,  Sciences de l’éducation, Université  de  Caen-Basse-Normandie.
  • Serge Tomamichel, Sciences de l’éducation, Université de Lyon 2

Date et lieu

Lieu : Pôle universitaire Pierre Jakez Hélias, Université de Bretagne occidentale, Quimper

Date : 19-20 mai 2016.

Langues de travail

  • français,
  • anglais

Argument

Many times throughout history, the situation has occurred in which different linguistic practices share the same physical space. These practices differ according to social strata as well as social usage and type of interaction. Western Brittany has certainly found itself in this situation, even in the 20th century, when, according to Pierre Jakez Hélias’ account, the Breton language reigned supreme in villages, on the street, in businesses and the church, while French was limited to schools and interactions between the city and public institutions.

However, it is important to realise that such situations are not exclusive to outlying regions with strong linguistic idiosyncrasies. The patois of the country folk in Molière is a source of comedy for the city dwellers, who have evolved in another, albeit not so distant, linguistic environment. At that time, a third language had also taken root, at once dead and living, the prerogative of and object of diligent study for the upper classes for a part of their education. We are, of course, talking about Latin, which was used as an administrative and intellectual language for a longer period of time elsewhere in Europe and in certain global institutions than in France. Father Julien Maunoir, a Jesuit priest from French-speaking Upper Brittany assigned to the college in Quimper in the 17th century, used three languages adapted to different types of interaction: French for everyday communication in the town or formal communication with the upper classes, Latin for teaching and certain administrative procedures of his order, and the vernacular, Breton in this case, to evangelise the countryside peasants as part of his pastoral work.

While the Church may have recognised the need to speak the language of its flock, emerging nation states were often tempted to impose linguistic uniformity. The “language policy” started by the French Revolution considered “patois” to be obstacles to the expansion of the Republic and sought to eradicate them, notably using schools[1]. The real impact of and methods implemented with this policy on the ground are yet to be studied. Additionally, the matter of the role of schools in a context of coexisting, indeed conflictual, languages still arises irrespective of any proactive policy.

However, we are not only interested in conflict between clearly differentiated linguistic groups (such as French/Breton, German/Czech), we would also like to look more broadly at conflict between formal and informal variations within the same linguistic group. The idea of dialect, in the sense more often used in Germanic countries, is certainly more relevant here than the concept of patois. There are many possible variations on this theme: language of the upper classes vs. language of the lower classes, city languages vs. country languages, language of power vs. language of the subject, scholarly language vs. the vernacular, native languages vs. language of the occupiers or colonisers. This issue should also be considered differently depending on the level of education in question, from primary school to university.

The questions we are most interested in regarding this theme are the following:

  1. What role do schools play in language? This clearly depends on the context, which varies according to location and period in history, as well as the level of education. According to these factors, the role of schools could come down to providing formal language, the language of administration, literature, and national cohesion. The latter may also imply the following on an ideological level: the language of revolution, the nation, socialism, the language of religion (Literary Arabic in the Muslim world or Latin in Catholic countries).
  2. What is the relationship between these languages within schools? What procedures are in place to separate the use of languages or exclude one or more languages entirely?
  3. What are the teaching methods used to convert pupils or students from their mother tongue to an official language? On the other hand, what are the methods used to repress the mother tongue (punishment, humiliation, stigmatisation using a “symbole[2]; what level of leniency is granted over usage and deviation from the rules?
  4. What status does a language acquire from being encouraged, imposed, acknowledged, or tolerated at school? This also relates to foreign languages when they function as carriers of new cultural models distinctive of an elite and are in fact used within this group as a means of communication: for example, Italian, Spanish, French, and English in turn in the nobility and high society, at least in certain parts of Europe.
  5. How far-reaching are these effects? Is the role of the education system in the evolution of linguistic practices not sometimes overestimated, particularly regarding the vernacular? Can schools change linguistic usage over the long-term or even save a language?

[1] Michel de Certeau, Domiique Julia, Jacques Revel, Une politique de la langue: la Révolution française et les patois: l'enquête de Grégoire, 1975, updated second edition, Paris: Gallimard, 2002.

[2] The “symbole” was an item (a clog, a skittle) given to a child when caught speaking his/her native language

Submission guidelines

Deadline for submitting proposals for papers: 30 September 2015

Provide a title, a description of the paper of between 1,500 and 3,000 characters, as well as some personal information and details of publications (institutional role, speciality(ies), and a few publications related to the subject or field).

Organisation

Colloquium organised by CRBC (Centre de Recherche Bretonne et Celtique, EA 4451) and supported by ATRHE (Association transdisciplinaire pour les recherches historiques sur l’éducation)

Chair

Jean-Luc Le Cam, Associate Professor of Modern History

Jean-Luc.LeCam@univ-brest.fr

Scientific committee

  • Nelly Blanchard, Celtique, Université de Bretagne Occidentale, Brest
  • Jean-Luc Le Cam, Histoire moderne, Université de Bretagne Occidentale, Brest
  • Erwan Le Pipec, Sociolinguistique, Université de Bretagne Occidentale, Brest
  • Youenn Michel,  Sciences de l’éducation, Université  de  Caen-Basse-Normandie.
  • Serge Tomamichel, Sciences de l’éducation, Université de Lyon 2

Venue

Pôle universitaire Pierre Jakez Hélias, Université de Bretagne occidentale, Quimper

Date: 19-20 May 2016.

Working languages

  • French,
  • English

Orte

  • Pôle universitaire Pierre Jakez Hélias - 18 Avenue de la Plage des Gueux
    Quimper, Frankreich (29)

Daten

  • mercredi, 30. septembre 2015

Schlüsselwörter

  • enseignement, langue, sociolinguistique, école, méthode, pédagogie

Kontakt

  • Jean-Luc Le Cam
    courriel : Jean-Luc [dot] LeCam [at] univ-brest [dot] fr

Informationsquelle

  • Jean-Luc Le Cam
    courriel : Jean-Luc [dot] LeCam [at] univ-brest [dot] fr

Zitierhinweise

« L'école et les langues dans les espaces en situation de partage linguistique à travers l’histoire », Beitragsaufruf, Calenda, Veröffentlicht am vendredi, 18. septembre 2015, https://calenda-formation.labocleo.org/339295

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