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Memories of 20th century massacres
Mémoires des massacres du XXe siècle
Published on jeudi, février 16, 2017
Summary
Il s’agit de poser la question des différentes postures / situations mémorielles des sociétés, de leurs protagonistes (bourreaux, victimes, témoins), des enjeux et des usages sociaux et politiques posés par les différentes attitudes possibles notamment chez les anciens belligérants – déni, négation, oubli, aveu, pardon, concurrence mémorielle…le présent colloque entend s’attacher au seul aspect de la mémoire des massacres et non aux massacres eux-mêmes, en privilégiant la perception qu’en ont eu et/ou qu’en ont encore les sociétés, à travers leurs instances officielles sans négliger le point de vue « d’en bas » et les manifestations populaires qui y sont liées. Le colloque aura lieu les 22, 23 et 24 novembre 2017.
Announcement
Le colloque aura lieu les 22, 23 et 24 novembre 2017
Argumentaire
Le CRHQ et le Mémorial de Caen organisent en décembre 2017 un colloque international intitulé « Mémoires et massacres (ou crimes de masse) au XXe siècle ». Il s’agit de poser la question des différentes postures/situations mémorielles des sociétés, de leurs protagonistes (bourreaux, victimes, témoins), des enjeux et des usages sociaux et politiques posés par les différentes attitudes possibles notamment chez les anciens belligérants – déni, négation, oubli, aveu, pardon, concurrence mémorielle…
Du premier massacre des Herero perpétré en 1904, en Namibie par l’armée coloniale allemande à ceux des années 1990, des Tutsis au Rwanda par les Hutus ou des Bosniaques musulmans de Srebrenica par l’armée serbe, l’horreur de la mort de masse innerve le XXe siècle. Extermination des Arméniens durant la Première Guerre mondiale ou des Grecs anatoliens au début des années 1920 par les troupes ottomanes, terreurs, famines programmées et grandes purges de la Russie soviétique des années 1930 ou massacres japonais en Chine et notamment à Nankin, ou encore persécutions juives et tziganes de la Seconde Guerre mondiale et des autres crimes de masse auxquels elle a donné lieu, tout comme les nettoyages ethniques ou crimes des guerres civiles qui suivirent le retour à la paix, éliminations de masse en Chine, notamment lors de la révolution culturelle, au Cambodge devenu Kampuchea démocratique, … on sait que depuis 2008, le recensement de ces phénomènes mortifères a été en grande partie consigné, à l’initiative de Jacques Sémelin, dans une encyclopédie en ligne (http://www.massviolence.org/)
Soulignons que le présent colloque entend s’attacher au seul aspect de la mémoire des massacres et non aux massacres eux-mêmes, en privilégiant la perception qu’en ont eu et/ou qu’en ont encore les sociétés, à travers leurs instances officielles sans négliger le point de vue “d’en bas” et les manifestations populaires qui y sont liées. Cette dimension est importante dans la mesure où elle implique d’intégrer la mémoire de phénomènes mortifères massifs comme par exemple les bombardements stratégiques des villes durant la Seconde Guerre mondiale dont certains ont pu être vécus comme crimes de masse par une partie de leurs survivants ou par les descendants de leurs victimes. Ce choix invite également à dissocier l’ampleur des crimes étudiés et leur mise en mémoire et pose de nombreuses questions ou offre des lignes de réflexion notamment en rapport avec les thématiques suivantes :
Massacres et mémoires
On pourra s’interroger tout d’abord sur l’identification ou l’efficience en mémoire de la dimension “massive” du crime. Dans l’espace mémoriel, donc collectif comme invitait à le penser Maurice Halbwachs, quand commence le massacre et quand cette conscience collective apparaît-elle ? Si la question des chiffres constitue un enjeu évident entre victimes et bourreaux (ou acteurs), est-il possibe de définir des effets de seuil ou des critères symboliques caractérisant le phénomène ? La nature des faits eux-mêmes, et ce qu’il est convenu d’appeler les surviolences, influence-t-elle la qualification mémorielle des faits ? Ces questions et leurs corollaires pourraient être résumées de la façon suivante : quelle nature des faits pour quelle mise en mémoire ? On privilégiera dans un souci d’équilibre les études des cas les moins connus ou les moins étudiés.
Les mémoires et les mots
Les morts de masse par la famine en Ukraine ou celles des Juifs dans les chambres à gaz génèrent des discours et des transmissions différents définis par les mots qui sont au centre des enjeux mémoriels : crimes de masse ou massacres collectifs (ou de masse), génocide, appropriation en forme de revendication d’unicité spécifique dans l’évolution de la mémoire juive (holocauste, Shoah) ethnicides, nettoyages ou épurations ethniques, bombardements “stratégiques” éludant le massacre de civils… Les mots portent les mémoires dont ils sont les signifiants mortifères. Ils agencent celles-ci selon les nécessités sociopolitiques du présent et sont souvent les signes constitutifs de leur instrumentalisation.
Les mémoires amplifiées
Les crimes de masse peuvent aussi s’inventer ou s’amplifier et trouver dans imaginaire des vérités sans fondement. Ainsi en va-t-il de certaines dénominations tendant à exagérer les faits pour mieux servir des intérêts du moment. La formule “épuration sauvage” par exemple, apparaît en France dans les années 1980 pour évoquer, à rebours de tous les comptages scientifiques, les morts dus aux exactions lors de la Libération en 1944. Au-delà de la rigueur des chiffres, certains massacres qui n’ont pourtant rien de comparable en proportion avec ce qu’il est convenu d’appeler “crimes de masse”, peuvent cependant être revendiqués comme tels dans les (re)constructions mémorielles partisanes ou sous l’emprise d’influence “héroïco-victimaires”. À l’inverse, on pourrait s’interroger sur les conditions particulières ayant empêché ou empêchant encore l’émergence publique de crimes de masse inconnus ou mal connus.
Mémoires conflictuelles
Concurrents et/ou conflictuels,—leur développement indique le plus souvent qu’il le sont à un moment ou à un autre—, les processus mémoriels des crimes de masse se caractérisent, selon les points de vue ou les parties, par l’affirmation ou le silence, la revendication ou le déni. Les mémoires sont otages de l’oubli, enfouies, endormies, réveillées puis émergentes, contestées puis reconnues et légitimées. Rhizome émotionnel des sociétés chaque traumatisme collectif connaît en devenir sa propre évolution et peut-être aussi une forme d’autonomie tant il est soumis aux multiples enjeux du temps présent. Nous nous attacherons ici tout particulièrement aux travaux tendant à historiciser ces phénomènes en les replaçant dans leur contexte.
Les lieux de mémoire :
Les musées, les mémoriaux et autres monuments commémoratifs constituent naturellement des indicateurs précieux tout comme le débat social entourant leur genèse. Il en va de même pour leur usage public et les différentes justifications officielles ou officieuses prônant leur nécessaire fréquentation (cf le débat autour le la visite à Auschwitz), leur réception et le sens que l’on peut donner à leur niveau de fréquentation. Indicateurs de mémoire, ces lieux évoluent et, le temps passant, on constate un glissement fréquent de leur identité, le plus souvent de la guerre à la paix. Ces lieux (ces totems ?) sont parfois trace de l’évolution de la demande sociale ou signe d’un changement de l’usage politique du passé. Leur mutation de musée de la guerre en musée de la paix est souvent signe, le temps de la colère et de la récrimination passant, d’un premier pas de réconciliation vers l’ancien agresseur. Ainsi pourrait-on poser la question de savoir qui souffre de la guerre dans les musées ? L’exemple fourni par les musée japonais (environ 3,1 M de morts japonais pour environ 20 M de victimes de la guerre d’agression) permet de saisir la pluralité des postures locale/régionale devenant source de confusion ou de flou entre victimes civiles et victimes de l’armée impériale.
La mémoire judiciaire des massacres : les procès
On pourra également s’attacher à ces marqueurs importants que sont les procès, regénérateurs du débat social en même temps qu’ils établissent une forme de bilan de la situation mémorielle d’une société à un moment donné. Lorsqu’ils entrent en conjonction avec des luttes montantes, les procès peuvent contribuer à l’émergence d’autres mémoires comme, par exemple, celle dite “genrée”, liée aux viols et aux exactions envers les femmes de réconfort en Asie, qui donnèrent lieu après la 4e conférence des femmes de l’ONU à Pékin en 1995, au Tribunal international des femmes sur l’esclavage sexuel à Tokyo cinq ans plus tard. Enfin, la question des réparations et le processus généralement long qui y mène peut être naturellement objet d’étude. Ici s’achève généralement le cheminement toujours long vers la reconnaissance des faits par ceux qui les ont commis, avant que résilience et réconciliation n’estompent la mémoire des crimes, rarement jusqu’à l’oubli.
Comité scientifique (provisoire)
- Eismann (UCN),
- S. Grimaldi (Mémorial),
- J-L Leleu (MRSH Caen),
- M. Lucken (INALCO),
- S.Martens (IHA),
- D. Peschanski (CNRS),
- F. Rouquet (UCN),
- J. Sémelin (CNRS),
- F. Virgili (CNRS),
- A. Wieviorka (CNRS)
Date : 22, 23 et 24 novembre 2017
Lieu : Mémorial de Caen (France)
Modalités pratiques d'envoi des propositions
La date limite de soumission des communications est fixée au 15 avril 2017
Conditions de soumission : la préférence sera accordée aux études historiques ou non faisant ressortir de nouvelles perspectives ou champs d’étude. Les propositions, en français ou en anglais, doivent prendre la forme d’un résumé de 300 mots accompagné d’un CV d’une page et nous parvenir adressées à francois.rouquet@unicaen.fr
Argument
In November 2017, the CRHQ (Centre de Recherche d’Histoire Quantitative – Centre for Research in Quantitative History) and the Mémorial de Caen are organising an international symposium entitled “Remembering 20th century massacres (or mass crimes)”. The symposium will focus on different memory-based positions/situations and their social and political impact and purpose in the societies in question, particularly among former belligerents – denial, negation, oblivion, confession, pardon, the conflict between memories etc. – and will cover all the different parties involved (persecutors, victims, witnesses).
From the Herero genocide of 1904, enacted by the colonial German army in Namibia, to the massacres of the 1990s, of the Tutsi people by the Hutu government in Rwanda or of Muslim Bosnians in Srebrenica by the Serbian army, the horror of mass slaughter has punctuated the whole of the 20th century. The recurrence of Balkan massacres ever since 1913, the extermination of Armenians during the First World War, the slaughter of Anatolian Greeks by Ottoman troops in the early 1920s, the terror, planned famine and large-scale purge of Soviet Russia during the 1930s, the Japanese massacres in China, particularly in Nanking, the extermination of Jews and Romani by Nazi Germany and the war of annihilation in the East during the Second World War, as well as the ethnic cleansing and civil war crimes that followed the return to peace, the massacres during decolonisation and the Cold War, the mass slaughters in China during the cultural revolution, the ethnic cleansing in Cambodia, which was then Democratic Kampuchea, and many more such crimes. Since 2008, following the initiative of Jacques Sémelin, the majority of these acts of slaughter have been brought together in an online encyclopaedia (http://www.massviolence.org/).
We would like to point out that the 2017 symposium will be focusing on the memory of genocide and not on the genocide itself, with a particular focus on the perception that societies had and/or still have, through their official bodies but also without overlooking the point of view of “ordinary” people and public demonstrations of this perception. This aspect is important in that it suggests that we must also include the memory of acts of mass slaughter such as the strategic bombing of cities during the Second World War, which could be seen as mass crimes by some of their survivors or by the descendants of their victims. This choice also encourages us to dissociate the scale of the crimes studied and the way we remember them. It also calls raises a number of questions and offers lines of thought, particularly in relation to the following themes:
Massacre and memory
We can first of all look at the question of identification or memory efficiency concerning the “mass” dimension of the crime. In memorial space, which Maurice Halbwachs suggested was a collective space, when does genocide begin and when does this collective conscience appear? Although numbers – of victims and perpetrators - are of obvious importance, can we actually define thresholds or symbolic criteria to characterize the phenomenon? Does the nature of the actual events, and what has been termed further violence, influence how memory qualifies the facts? These questions and their corollaries can be summarised in the following way – how does the nature of events affect how we remember them? To ensure we provide a balanced approach, we will give priority to studies of lesser known or less researched cases.
Memories and words
Mass slaughter, whether through famine in Ukraine or of Jews in gas chambers, generates different versions of dialogue and transmission that are defined by the words chosen. Words are a key element of issues surrounding memory – mass crimes or collective (or mass) massacres, genocide, appropriation in the form of claims of specific uniqueness as Jewish memory evolves (Holocaust, Shoah), ethnocide, ethnic cleansing or purification, “strategic” bombings that elude the massacre of civilians… Words carry the memories of which they are the lethal signifiers. They adapt our memories according to the socio-political requirements of the day and are often the constituent signs of this manipulation.
Memory amplified or amputated
Mass crimes can also be invented or amplified and can uncover unfounded truths in our imagination. Such is the case in certain denominations that tend to exaggerate the facts in order to better serve the interests of the moment. For example, the expression “untamed cleansing” appeared in France during the 1980s in reference, contrary to all scientific census, to deaths caused by acts of violence during the Liberation in 1944. Beyond the rigour of numbers there are some massacres that, although proportionally far from comparable with so-called “mass crimes”, can nevertheless be claimed as such in partisan (re)construction of memory or under the influence of a “hero-victim” effect. Conversely, we can study the specific conditions that prevented or that still prevent public recognition of unknown or little known mass crimes.
Contentious memory
Usually shown to be, at one time or another, competing and/or conflicting, memory processes relating to mass crimes are characterised, depending on points of view or on the parties involved, by affirmation or silence, and by claim or denial. They become even more complex when social or ethnic groups become in succession, and often in a spirit of retaliation, perpetrators and victims. Memories are taken hostage by forgetting. Buried, put to sleep, then awakened to emerge, first contested then recognised and legitimised. At the emotional root of society, every collective trauma experiences a form of autonomy as it is placed in our memory, since it is subjected to the multiple issues of the present day. Here we will be particularly focusing on studies that concentrate on the historical framework of these phenomena by putting them in context.
Places of memory
Clearly, museums, memorials and other commemorative monuments are precious indicators of memory, as indeed is the social debate that surrounds their creation. The same goes for their public use and the various official or unofficial justifications that advocate the necessity of visiting them (e.g. the debate surrounding Auschwitz), as well as how they are received and the meaning that can be attributed to visitor numbers. These indicators of memory evolve through time and frequently undergo shifts in their identity, most often from wartime to peacetime. These places (totems?) are sometimes the remnants of changes to social demand or the signs of a shift in political use of the past. Their evolution from museums of war to museums of peace is often the sign, once the period of anger and recrimination has passed, of a first step towards reconciliation with the former aggressor. Is it therefore possible to ask who suffers from war in these museums? The example provided by Japanese museums (about 3.1 million Japanese people died for 20 million victims of the war of aggression) enables us to understand the plurality of local/regional positions that become a source of confusion or uncertainty between civil victims and victims of the imperial army.
We can also include artistic production in these places of memory. This aspect can clearly not be overlooked when we see to what extent mass crimes have been a source of inspiration/fascination in graphic art, literature, poetry, cinema and theatre... The study of these works is even more interesting because the way they are received by their audience and critics transcribes current opinion, awakens our consciences, triggers or reactivates social debate and is therefore a wonderful sounding box for memory.
Judicial memory of massacre: trials
We will also focus on the important markers that are legal proceedings, which rekindle social debate whilst providing a sort of overview of a society’s memory at a given time. When they converge with rising struggles, trials can help to draw out other memories such as, for example, the gender-based crimes of rape and abuse of comfort women in Asia which, after the UN’s Fourth World Conference on Women in Beijing in 1995, led to the Women’s International War Crimes Tribunal in Tokyo five years later. Finally, we will of course be looking at the question of reparation and what is usually a long process to reach it. Here is where generally lies the end of a long path to recognition of the facts by those who committed them, before resilience and reconciliation blot out memory of the crimes, rarely to the point of forgetting.
Temporary Scientific Committee
- G. Eismann (UCN),
- S. Grimaldi (Mémorial),
- J-L Leleu (MRSH Caen),
- M. Lucken (INALCO),
- S.Martens (IHA),
- D. Peschanski (CNRS),
- D. Pohl (Univ. Klagenfurt),
- F. Rouquet (UCN),
- J. Sémelin (CNRS),
- F. Virgili (CNRS),
- Nicolas Werth (CNRS),
- A. Wieviorka (CNRS)
Dates: 22, 23 and 24 November 2017
Venue: Mémorial de Caen (France)
Submission guidelines
The deadline for submission of papers is 15 april 2017
Conditions for submission: priority will be given to historical research that provides new perspectives or fields of study. Proposals, in French or English, must be submitted as a 300-word abstract and sent along with a single page CV to:
francois.rouquet@unicaen.fr
Subjects
- History (Main subject)
- Society > Political studies > Wars, conflicts, violence > Genocides and massacres
- Zones and regions > Africa
- Periods > Modern > Twentieth century
- Zones and regions > America
- Zones and regions > Asia
- Zones and regions > Europe
- Society > Political studies > Wars, conflicts, violence
Places
- Mémorial de Caen - Esplanade Général Eisenhower
Caen, France (14050)
Date(s)
- samedi, avril 15, 2017
Keywords
- mémoire, massacre, usage politique du passé
Contact(s)
- François Rouquet
courriel : francois [dot] rouquet [at] unicaen [dot] fr
Reference Urls
Information source
- François Rouquet
courriel : francois [dot] rouquet [at] unicaen [dot] fr
To cite this announcement
« Memories of 20th century massacres », Call for papers, Calenda, Published on jeudi, février 16, 2017, https://calenda-formation.labocleo.org/394971