StartseiteLes manières de faire vernaculaires

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Veröffentlicht am lundi, 13. mai 2019

Zusammenfassung

La notion de vernaculaire tend de plus en plus à échapper à l’opposition ancienne entre, d’une part, les idées de proximité et d’ancrage local qu'elle porterait traditionnellement et, d’autre part, celles de circulation et d’extra-localité qu'on associe par contraste au véhiculaire. La substantivation de l’adjectif vernaculaire et son adossement à celui de contemporain accompagne cette évolution. Aujourd’hui, le vernaculaire semble constituer un domaine culturel regroupant des manières de faire linguistiques, architecturales, paysagères, picturales, relevant de la création artistique, ou encore de la production d’objets. Ce colloque aura pour objet d’interroger cette notion à travers son renouvellement sémantique, ses circulations géographiques et ses ancrages disciplinaires.

Inserat

Argumentaire

Depuis une quinzaine d’années, un usage renouvelé de la notion de vernaculaire s'observe dans le monde francophone. Il dépasse le champ de la linguistique et échappe à l’opposition ancienne entre, d’une part, les idées de proximité et d’ancrage local que porterait la notion de langue vernaculaire et, d’autre part, celles de circulation et d’extra-localité qu'on associe par contraste à la langue véhiculaire. La substantivation de l’adjectif vernaculaire et son adossement à celui de contemporain accompagne ce renouvellement. Le nouveau vernaculaire semble constituer un domaine culturel à part entière, regroupant des manières de faire linguistiques, architecturales, paysagères, picturales, matérielles, relevant de la création artistique et littéraire, ou encore de la production d’objets et d’agencements pratiques. De même, le vernaculaire n’apparait plus seulement comme une déclinaison, plus populaire et informelle, de l’idée de traditionnel. En architecture, par exemple, il semble embrasser des modes de construction non-standardisés, peu durables, issus de savoir-faire non-académiques, et instables, qui épouseraient la variabilité, parfois importantes, des conditions sociales et des milieux géographiques.

Certains auteurs ont proposé, ces dernières décennies, un quasi renversement sémantique de la notion. Chez eux, il n’existe pas de patrimoine vernaculaire à identifier, classer et conserver, mais des agencements précaires qui changeraient de nature dès lors qu’ils sont figés. Le vernaculaire ne résisterait pas à sa patrimonialisation. Il résulterait d’actions fragmentaires et circonstancielles, fondées sur des projections à court terme.

Cette acception du vernaculaire pourrait avoir été introduite en Europe continentale, et notamment dans la recherche francophone, depuis une quinzaine d’années. Il est probable que A la découverte du paysage vernaculaire (2003), traduction du recueil d’essais de John Brinckerhoff Jackson Discovering the Vernacular Landscape (1984), y ait contribué. A partir de cet ouvrage, la notion semble avoir été diffusée dans le champ des études paysagères, urbaines, culturelles, de l’architecture, puis de la photographie et du design… Du livre Le Style documentaire (2001) d’Olivier Lugon à l’exposition Walker Evans présentée par Clément Chéroux au Centre Pompidou, l’exploration croissante de l’œuvre de Walker Evans (2017), par des chercheurs, curateurs et artistes, semble aussi avoir participé à l’interrogation grandissante de cette notion. Dans le même temps, l’ouvrage de Robert Venturi, Denise Scott Brown et Steven Izenour, Learning from Las Vegas (1972), a fait l’objet de multiples travaux. Des fragilités domestiques photographiées par Evans aux accumulations d’enseignes commerciales étudiées à Las Vegas, il semble bien exister une origine américaine à l’acception contemporaine du vernaculaire. Selon Jackson, ce serait bien moins la maison paysanne, construite en pierre et conçue comme une propriété familiale, que le mobile home, sans fondation et positionné provisoirement, qui en serait la figure archétypale. A suivre John A. Kouwenhoven et son livre The Beer Can by the Highway (1961), le jazz pourrait être une parabole musicale du vernaculaire et de la relation au monde auquel il convie : « Lorsque le Jazz est à son meilleur, chaque musicien parait être – ou a le sentiment d’être – isolé. Chacun agit à sa manière, inventant des motifs rythmiques et mélodiques qui, à première vue, ne semblent pas davantage articulés que ne le sont le siège des Nations Unies et l’Empire State Building. […] Comme Louis Armstrong l’a jadis écrit, on s'attendrait à ce qu’un groupe dont chaque musicien joue comme il l’entend aboutisse à beaucoup de confusion et à un bruit insensé' ». Le vernaculaire contemporain traduirait cette désarticulation apparente des actions individuelles ou, comme le jazz, porteuse d’une harmonie faite d’interventions composites.

Au-delà des circulations transatlantiques, l’essor des travaux sur le vernaculaire semble accompagner les questionnements qui se sont développés sur le Tiers-paysage, les communs, la polyfonctionnalité, les architectures participatives, les compétences habitantes, les pratiques amateurs, les potentialités du faire, mais aussi les usages du monde qui sont foncièrement utilitaires et sont porteurs de dégradations environnementales. En France, Le manifeste du Tiers-paysage de Gilles Clément succède, en 2004, à la publication en français d’A la découverte du paysage vernaculaire. Les travaux d’Ivan Illich sont réexplorés ; ils portent sur le vernaculaire comme domaine de production détaché des modes d’organisation industriels et hiérarchisés, et de tout enseignement institutionnalisé. Alors que plusieurs ouvrages sont en préparation ou paraissent sur Learning from Las Vegas, Pierre Frey publie en 2010 Learning from Vernacular, proposition théorique et aperçu mondial des formes vernaculaires contemporaines. Il rejoint là une tradition britannique d’études architecturales liant démarches encyclopédiques, études culturelles, perspectives patrimoniales et réflexions environnementales. En 1997, Paul Oliver, acteur central et fondateur de cette école, co-édite notamment l’Encyclopedia of Vernacular Architecture of the World et en 2006 Built to Meet Needs: Cultural Issues in Vernacular Architecture.

A l’écart du monde académique, les formes vernaculaires sont interrogées dans différents champs de l’art et de la conception. C’est en se consacrant à la représentation de ce qui échappe aux normes de fabrication urbanistique, industrielle et politique et de ce qui relève de la production domestique qu’Eugène Atget, en France, et Walker Evans, aux Etats-Unis, pourraient avoir ouvert et balisé un champ de recherche photographique qui se perpétue aujourd’hui. C’est aussi en transposant des manières de faire populaire et amateur dans leur discipline que des écrivains, musiciens, plasticiens, designers, architectes, etc., se sont tournés vers le vernaculaire.

  • Le colloque international Les manières de faire vernaculaires / Vernacular Ways aura pour objet d’interroger la notion de vernaculaire à travers :
  • son renouvellement sémantique, ses circulations géographiques et ses ancrages disciplinaires, de l’architecture à la photographie, des études littéraires à la philosophie, etc. ;
  • les production culturelles, matérielles et immatérielles, qu’elle qualifie ;
  • les modes de documentation, de description et de représentation auxquelles elle donne lieu.

Une attention particulière sera donnée aux propositions portant sur la théorisation du vernaculaire contemporain dans le monde anglophone, sur sa transposition en Europe continentale et dans le bassin méditerranéen, sur ses proximités avec des notions voisines, telles que celles de populaire, d’ordinaire, de domestique, d’amateur, d’utilitaire, mais aussi de spontané et d’informel. Les propositions provenant des études visuelles, littéraires, linguistiques, musicales, architecturales, urbaines et paysagères, sans exclusive, participeront à une réflexion que nous souhaitons pluridisciplinaire.

L'initiative de ce colloque revient à François Brunet, disparu fin décembre 2018. Il sera également l'occasion de rendre hommage au goût de ce dernier pour les décloisonnements et les transbordements indépendamment des hiérarchies instaurées entre le majeur et le mineur, les questionnements portés institutionnellement et les recherches menées en amateur.

Modalités de soumission

Les propositions de communication (300 mots), assorties d’une notice biographique, devront être envoyées à Jordi Ballesta et Eliane de Larminat avant le 10 juin 2019 : jordi.ballesta@laposte.net et elianedelarminat@posteo.net

Les communications pourront être données en français, comme en anglais.

Une sélection des communications sera publiée dans la revue en ligne Interfaces (consultable sur OpenEdition en 2019), labellisée et soutenue par le CNRS. Textes et images (libres de droits) devront être soumis au comité scientifique dans les deux mois suivant le colloque, soit au plus tard le 31 mars 2020.

Comité d’organisation

  • Jordi Ballesta (Université Jean Monnet, CIEREC - LARCA), Frédéric Ogée (Université de Paris, LARCA)
  • Mark Meigs (Université de Paris, LARCA)
  • Eliane de Larminat (Université de Paris, LARCA)

Comité scientifique

  • Jordi Ballesta (Université Jean Monnet, CIEREC - LARCA)
  • Antonello Frongia (Università Roma Tre)
  • Charlotte Gould (Université Sorbonne Nouvelle - Paris 3, PRISMES)
  • Jean Kempf (Université Lumière - Lyon 2)
  • Jerome Krase (Cuny Brooklyn College)
  • Eliane de Larminat (Université de Paris, LARCA)
  • Caroline Maniaque (ENSA de Rouen, AUSSER)
  • Mark Meigs (Université de Paris, LARCA)
  • Frédéric Ogée (Université de Paris, LARCA)
  • Thierry Paquot (Université Paris-Est Créteil Val-de-Marne, IUP)
  • Gary Van Zante (Massachusetts Institute of Technology)

Orte

  • Université Paris-Diderot
    Paris, Frankreich (75)

Daten

  • lundi, 10. juin 2019

Schlüsselwörter

  • vernaculaire, idée, États-Unis, Europe, Méditerrannée

Kontakt

  • Jordi Ballesta
    courriel : jordi [dot] ballesta [at] laposte [dot] net
  • Eliane de Larminat
    courriel : elianedelarminat [at] posteo [dot] net

Informationsquelle

  • Jordi Ballesta
    courriel : jordi [dot] ballesta [at] laposte [dot] net

Zitierhinweise

« Les manières de faire vernaculaires », Beitragsaufruf, Calenda, Veröffentlicht am lundi, 13. mai 2019, https://calenda-formation.labocleo.org/616253

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