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L’utilisation des flux numériques dans le cinéma
The use of digital flows in cinema
Publié le lundi 02 mars 2020
Résumé
Durant le premier semestre 2021, le cinéma Nova à Bruxelles organise une programmation thématique autour de l’usage des flux numériques au cinéma. Cette programmation montrera les films, essentiellement produits depuis une quinzaine d’années, qui utilisent différentes formes de flux numériques : caméras de surveillance, drones, caméras de robots industriels mais aussi Google Maps, service de streaming comme Periscope. Un ouvrage collectif sur ce thème sera publié à ce moment aux éditions Yellow Now. En avance de ce programme, deux tables-rondes seront organisées en juin 2020. Un compte-rendu de ces discussions publiques sera publié dans l’ouvrage.
Annonce
Présentation
L’utilisation des flux numériques dans le cinéma.
Durant le premier semestre 2021, le cinéma Nova à Bruxelles (https://www.nova-cinema.org/) organise une programmation thématique autour de l’usage des flux numériques au cinéma. Cette programmation montrera les films, essentiellement produits depuis une quinzaine d’années, qui utilisent différentes formes de flux numériques : caméras de surveillance, drones, caméras de robots industriels mais aussi Google Maps, service de streaming comme Periscope.
Un ouvrage collectif sur ce thème sera publié à ce moment aux éditions Yellow Now (http://www.yellownow.be/).
En avance de ce programme, deux tables-rondes seront organisées en juin 2020. Un compte-rendu de ces discussions publiques sera publié dans l’ouvrage.
Argumentaire
La vidéo représente 80% du trafic Internet. Si une part importante de ce flux d’images vient de la VOD, la majorité n’est pas lié au cinéma ou à la télévision : vidéos familiales hébergées sur Youtube ou Facebook, échanges téléphoniques sur Skype, streaming de jeu vidéo ou même vidéosurveillance - cette dernière occupant à elle seule 2% du trafic Internet. Ce flux d’images numériques fait partie de notre quotidien et nous donne accès à une quantité astronomique de contenus. Depuis une quinzaine d’années, les artistes audiovisuels, vidéastes comme cinéastes, questionnent et exploitent cette surabondance d’images pour lui donner un sens neuf.
Cette utilisation du flux vidéo numérique a d’abord été le fait de monteurs amateurs alimentant les plateformes de partage vidéos. Elle a ensuite été reprise par des vidéastes d’avant-garde, comme une héritière de décennies de found footage analogique (Excerpt de Guli Silberstein). Enfin, des réalisateurs se sont saisi de cette matière pour concevoir des films à projeter en salle. Ces films commencent à être reconnus comme des oeuvres à part entière et récoltent désormais des prix en festival (La Mer Intérieure de Jean-Marc Chapoulie, grand prix Fid Marseille 2019, Present. Perfect. de Shengze Zhu, grand prix IFFR Rotterdam 2019 entre autres). Ce type d’esthétique se retrouve aussi dans le cinéma grand public avec des films se passant uniquement sur un écran d’ordinateur, et recréant artificiellement ces flux numériques (Profile de Timur Bekmanbetov, Berlinale 2018, Unfriended de Levan Gabriadze ou, déjà, Redacted de Brian de Palma).
Nous estimons que ce genre de films mérite aujourd’hui une programmation à part entière parce qu’ils entrent en résonance avec des enjeux politiques du temps présent. Tout d’abord par la nature même des images que ces films utilisent : issues des grands groupes industriels du numérique, ces images ne sont plus réellement destinées à des spectateurs. Le nombre d’heures d’images produites les rend invisibles pour l’être humain. La plupart des vidéos ne sont “vues” que par l’algorithme des plateformes de partage, chargé de repérer de possibles infractions aux conditions d’utilisation. Quant aux images de caméras de surveillance ou celles intégrées aux robots, elles sont intégralement destinées à être analysées par ordinateur, sans être jamais vues par un œil humain. Ces images sont inhumaines.
Face à ce constat, les artistes et cinéastes tentent de remettre l’être humain dans des images qui l’excluent. Dominic Gagnon, documentariste qui a réalisé plusieurs films en montant diverses vidéos provenant de YouTube, décrit sa pratique comme celle d’un conservateur : il donne à voir les vidéos avec très peu de vues, voire il télécharge les vidéos avant que l’algorithme repère violences ou autres infractions et les censure. Timur Bekmanbetov, producteur de nombreux films de fiction où le récit se structure autour d’une interface numérique, conçoit cette nouvelle forme cinématographique comme une réponse à l’invasion des écrans et des algorithmes dans nos vies. Les cinéastes œuvrent contre les images qu’ils utilisent, en leur redonnant une vie et une profondeur qu’elles n’ont pas par nature.
Ces films vont plus loin encore : en relevant ces flux que personne ne voit, ils donnent la parole à ceux qui ne l’avaient plus : rednecks ignorés pendant les années Obama chez Dominic Gagnon, travailleurs et handicapés chinois dans Present. Perfect. Les films leur délèguent même une part de la grammaire cinématographique (cadre, lumière, interprétation, etc.), les rendant presque co-auteur de l’œuvre. A partir d’images inhumaines, les artistes créent une forme de cinéma démocratique où n’importe qui peut trouver une place. Les cinéastes retournent la logique industrielle des images issues d’Internet pour en faire un puissant outil politique.
La bibliographie concernant ce type de films est aujourd’hui quasi-inexistante. Les analyses disponibles sont toujours en lien avec des problématiques plus larges, comme la question du found footage ou celle de l’esthétique numérique au cinéma. Les particularités significatives de cette cinématographie, ainsi que sa présence de plus en plus importante et reconnue dans les festivals et dans les salles, nous ont décidé à publier un premier ouvrage faisant le point sur cette pratique.
Précisions
Corpus
Le corpus des films concernés est défini comme suit : un film doit, dans sa majorité, utiliser des images assimilables à des flux numériques.
Cela peut être délimité par une propriété technique : le film est majoritairement composé d’images provenant d’un ou plusieurs flux numériques : vidéo YouTube, site de streaming, caméra de surveillance, drones, etc. Nous pouvons donner comme exemple la filmographie de Dominic Gagnon (Going South, Of the North, etc.) ou encore La Mer Intérieure de Jean-Marc Chapoulie.
Cela peut aussi être délimité par un choix esthétique : les films de fiction reproduisant artificiellement l’environnement des flux numériques sont ainsi partie intégrante du corpus. Nous pouvons donner comme exemple les Screen Life Movies de Timur Bekmanbetov (Profile, Unfriended) ou The Collingswood Story de Mike Constanza.
Enfin, certains films peuvent être sujets à discussions si leur dispositif place en son centre l’utilisation des divers flux numériques. Si tous les films de correspondance entre cinéastes ne semblent pas pertinents au premier abord, un film comme Temps Mort de Mohammed Bourouissa est intégré parce qu’il met en scène l’échange de MMS, et le place comme seul possibilité de faire un film en prison.
Format des contributions
L’ouvrage comportera deux types d’articles, en plus des compte-rendu des tables rondes :
- De cinq à sept essais transversaux (environ 30 000 signes). Ces essais doivent se pencher sur une large part du corpus afin d’en faire émerger des questions propres à ce type de films
- Une dizaine de monographies (environ 10 000 signes). Ces articles doivent s’attarder sur un film ou sur un groupe de film en particulier. En pointant un film représentatif, ou en liant entre eux plusieurs films par des aspects techniques ou esthétiques, ils participent à dresser une typologie de ce genre cinématographique.
Les propositions de contribution peuvent concerner ces deux catégories d’articles.
Pistes de réflexion
Nous vous présentons ici quelques pistes de réflexion qui nous semblent pertinentes :
- Comment traiter des images qui appartiennent aux grands conglomérats informatiques, dont certaines ne sont même pas pensées pour l’oeil humain ? Peut-on ignorer leur origine, ou cette dernière doit-elle être le centre de toutes réflexions ?
- Comment ces images nous donnent-elles accès à des personnes rarement filmées par les médias, voire même les cinéastes ? Comment les flux numériques permettent d’aller au-delà de certaines barrières, nous donnant des images de territoires en guerre, de la prison, etc. ? Les films qui en résultent relèvent-ils de la biographie (le cinéastes choisit un personnage) ou de l’autobiographie (la personne filmé se filme elle-même) ? En réorganisant les images, le cinéaste devient-il celui qui transforme des images d’une communauté en témoin d’une société ? Ces films sont-ils porteurs d’une forme d’utopie démocratique ?
- Comment analyser des films qui remettent en question la grammaire cinématographique classique ? Peut-on encore parler de découpage, de point de vue, etc. ? Le montage devient-il le seul moment d’expression du cinéaste ? Chaque Youtubeur n’est-il pas dès lors un cinéaste en puissance?
- Comment récupère-t-on ces images ? Quels sont les problèmes légaux, mais aussi éthiques ou techniques ? Quelle différence y a-t-il entre un film reprenant des flux numériques et une vidéo de compilation postée sur Youtube ? Certaines façons de filmer sont-elles tributaires de modes (Vines, Stories, etc.) ?
- Peut-on réellement parler d’un genre cinématographique à part entière ? Est-ce simplement le développement d’autres genres cinématographiques (film de remploi, mondo, etc.) et de pratiques de grands cinéastes (Marker, Godard, Farocki) ? Est-ce que ce type de films est amené à se développer, ou est-il simplement le témoin d’une époque qui s’interroge sur son rapport aux réseaux ? L’évolution des plates-formes de partage (monétisation, limite du nombre de vidéos, etc.) est-elle une menace pour ce type de cinéma ?
Accès aux ressources
Sur demande, nous pouvons mettre à disposition des personnes souhaitant envoyer une proposition de contribution la filmographie que nous avons établie, ainsi que la plupart des films la composant.
Les adresses mail pour faire cette demande sont les mêmes que pour l’envoi des contributions.
Modalités de soumission
Les propositions de contributions, en français, doivent comprendre :
- un titre et un résumé de 1500 signes maximum
- la partie de l’ouvrage dans laquelle vous pensez inscrire votre contribution
- une brève notice bio-bibliographique indiquant vos champs de recherche, vos laboratoire et/ou institution de rattachement, vos éventuelles publications
- une courte bibliographie indicative sur laquelle se basera votre intervention
Le propositions sont à envoyer aux adresses suivantes, ayant comme objet « proposition Flux Numériques Cinéma Nova » : nicolas@nova-cinema.org, fpsaget@yahoo.fr, epitaf@collectifs.net
Comité éditorial
- Guy Jungblut, directeur des éditions Yellow Now
- Pauline Bejarano Dewulf, programmatrice au Cinéma Nova
- Nicolas Bras, programmateur au Cinéma Nova
- Frédéric-Pierre Saget, programmateur au Cinéma Nova
Calendrier
-
Date limite de soumission des propositions : 31 mars 2020
- Annonce de l’acceptation des propositions : mi-avril 2020
- Organisation des tables rondes : juin 2020.
- Remise d’une première version complète des contributions pour retour : fin juin 2020
- Remise des contributions définitives : fin août 2020
- Publication prévue printemps 2021
Catégories
- Représentations (Catégorie principale)
Lieux
- Cinéma Nova - Rue d'arenberg, 3
Bruxelles, Belgique (1000)
Dates
- mardi 31 mars 2020
Fichiers attachés
Mots-clés
- cinéma, flux, internet
Contacts
- Frédéric-Pierre Saget
courriel : fpsaget [at] yahoo [dot] fr
URLS de référence
Source de l'information
- Frédéric-Pierre Saget
courriel : fpsaget [at] yahoo [dot] fr
Licence
Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la CC0 1.0 Universel.
Pour citer cette annonce
« L’utilisation des flux numériques dans le cinéma », Appel à contribution, Calenda, Publié le lundi 02 mars 2020, https://calenda-formation.labocleo.org/753130