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Corps et pouvoir : le corps dans l’art politique des temps modernes
Body and power: the body in political art in the modern age
Publié le mercredi 04 novembre 2020
Résumé
L’ambition de ces deux journées de colloque est d’explorer des problématiques liées au corps porteur d’un discours politique, en mobilisant des œuvres créées depuis la Renaissance jusqu'à l’aube du XIXe siècle. En rassemblant jeunes chercheurs et chercheurs confirmés, français et étrangers, cet événement permettra de confronter des méthodologies (approches formelles, iconographiques, esthétiques...) en réunissant des cas d’études divers discutant de ces corps imposants, héroïques, séduisants, inquiétants ou repoussants, dont l’anatomie fut plus ou moins dévoilée pour incarner, entre autres, la figure du vainqueur invincible comme celle, par opposition, de la victime vulnérable.
The ambition of these two days is to explore issues related to the body carrying a political discourse, by mobilizing works created from the Renaissance to the dawn of the 19th century. By bringing together young and experienced researchers, both French and foreign, this event will make it possible to confront methodologies (formal, iconographic, aesthetic approaches...) by bringing together various case studies discussing these imposing, heroic, seductive, disquieting or repulsive bodies, whose anatomy was more or less unveiled to embody, among other things, the figure of the invincible victor as opposed to the vulnerable victim.
Annonce
Toulouse - Hôtel d'Assézat - 10 et 11 juin 2021
Argumentaire
À la Renaissance, il devint fréquent de voir des corps, masculins comme féminins, transformés et exploités de manière stratégique au travers des œuvres. Réels ou mythiques, âgés ou juvéniles, souvent porteurs d’un imaginaire complexe, ils étaient conçus et perçus tels des métaphores et régulièrement utilisés en instruments de propagande. La figuration du corps avait en effet, à l’époque moderne, une place fondamentale dans le processus d’exaltation et de légitimation des élites. Dans le cadre de ce colloque, toute commande exposant un ou des corps, destinée à célébrer une forme de pouvoir politique, pourra alors être prise en compte. Le corps fut appréhendé comme outil politique dans de nombreuses études dont la vision historicisante s’appuie en particulier sur le concept des deux corps du roi explicité par Ernst Kantorowicz dans les années 1950. Dans le domaine de l’Histoire de l’art, c’est sur la base des travaux d’Aby Warburg que s’est développé l’intérêt pour l’iconographie politique. La Warburg Haus de Hambourg mène depuis 1991, grâce à l’impulsion de Martin Warnke, des recherches s’appuyant sur l’exceptionnel index de documents et d’images politiques conservées au sein de leurs archives dont l’emblématique publication du manuel Politische Ikonographie. Ein Handbuch: Bd.1: Abdankung bis Huldigung. Bd. 2: Imperator bis Zwerg (dirigée par Uwe Fleckner, Martin Warnke et Hendrik Ziegler). Les recherches de l’historien Gérard Sabatier, qui ont exprimé tout l’intérêt des stratégies visuelles au service de la monarchie, témoignent du développement de ces problématiques en France. En toute logique, c’est la figure du roi qui fut privilégiée, tant au sein des ouvrages que des événements scientifiques sur le sujet, comme en atteste également le colloque présenté à Blois en 2010 : Roi cherché, roi montré, roi transfiguré. Corps politique et corps du pouvoir en Europe (XVe-XVIe siècles). Ce colloque « Corps et pouvoir » tend toutefois à se dégager de l’exclusive figure du prince car, bien que centrale, elle n’est pas l’unique concernée. Les dirigeants s’appuyaient sur l’idéalisation de leur propre personne afin de renforcer leur prééminence. Cependant, si leurs corps furent mis en scène et glorifiés au sein de leurs portraits – comme un élément essentiel pour rassurer ou impressionner – ils pouvaient également être juxtaposés à d’autres. Les corps de ces figures secondaires, ennemies ou alliées, pouvaient venir intensifier le message véhiculé, en étant intégrés à leurs représentations ou en dehors. Ainsi, tous les corps pourront être évoqués : ceux des élites comme ceux auxiliaires, destinés à soutenir d’un point de vue sémantique l’idée de puissance. Les études menées dans le champ de recherche des genders studies permettent d’ailleurs d’appréhender la manière dont les corps masculins et féminins entretiennent et exacerbent des rapports complexes de domination au sein de cette iconographie du pouvoir. Il sera également nécessaire d’interroger les éléments qui rendaient ce pouvoir concret, visible et palpable. Des objets d’apparat couvraient les corps pour les transcender tandis qu’en réponse, des corps couvraient à leur tour les objets, le tout articulant un discours substantiel qu’il convient de déchiffrer. Ces mêmes corps peuplaient l’espace des palais et autres lieux où s’exerçait l’autorité. Au sein de décors pérennes comme éphémères, ils rythmaient les façades à travers les ordres anthropomorphes, peuplaient les niches, ornaient les portiques des entrées triomphales, habitaient les fontaines, escaliers, cheminées, etc. Là encore, chacune de ces expressions doit engendrer une réflexion relative à son contexte de création et d’exposition, ainsi qu’à ses intentions. La dimension politique de nombre de ces créations mérite encore d’être approfondie, notamment au prisme de ce que Victor Stoïchita qualifie d’« hétérogénéité constitutive de l’objet corps » (Des Corps, Anatomie, Défense, Fantasmes, 2019). Le programme s’articule par conséquent autour de la relation inhérente entre le corps et la polysémie des termes « pouvoir » et « puissance », désignant aussi bien les aptitudes que la force ou l’autorité. Montrer un corps, c’est un moyen efficace de subjuguer et de convaincre. La posture, la gestuelle, la musculature qui lui sont attribuées, la sensualité, la grâce, l’élégance qui s’en dégagent, contribuent à traduire des idées. Le corps est à la fois subordonné et estimé par et pour le pouvoir et, tel un effet de miroir, c’est aussi par son pouvoir esthétique, émotionnel et symbolique qu’il honore et valorise les puissants. Si longtemps la référence biblique servit de prétexte à l’exhibition de ces corps, la réappropriation de la culture antique leur fit quitter les sphères privées et sacrées pour gagner l’espace public. Cet essor témoigne d’une compréhension généralisée de la force herméneutique, de la portée expressive et persuasive du corps dont la puissance évocatrice se développe au regard du rapport étroit entre impression physique et aspect psychologique. Ces compositions pleines de vitalité, d’affects et de dynamisme ont conféré, à partir de sujets ambivalents et parfois violents, une force émotionnelle et sensorielle indispensable au processus de séduction politique. Il s’agit alors d’apprécier la place des sens - optiques et haptiques - dans l’iconographie politique, tant formellement que sémiotiquement. En somme, l’ambition de ces deux journées est d’explorer des problématiques liées au corps porteur d’un discours politique, en mobilisant des œuvres créées depuis la Renaissance jusqu'à l’aube du XIXe siècle. En rassemblant jeunes chercheurs et chercheurs confirmés, français et étrangers, cet événement permettra de confronter des méthodologies (approches formelles, iconographiques, esthétiques...) en réunissant des cas d’études divers discutant de ces corps imposants, héroïques, séduisants, inquiétants ou repoussants, dont l’anatomie fut plus ou moins dévoilée pour incarner, entre autres, la figure du vainqueur invincible comme celle, par opposition, de la victime vulnérable.
Les communications pourront ainsi explorer des sujets s’intégrant à ces quatre grandes thématiques :
- Le corps comme stratégie figurative dans les représentations des élites
- Le pouvoir du corps : sens et émotions enflammés dans l’imaginaire politique
- Puissances du corps dans les objets d'apparat
- Les règnes du corps dans les décors princiers
Modalités de contribution
Les propositions de communication devront comprendre titre et résumé (entre 350 et 500 mots environ en anglais ou en français), une brève notice bio-bibliographique et des coordonnées. Elles sont à envoyer à l’adresse suivante : corps.pouvoir@gmail.com
au plus tard le 1er décembre 2020.
Le comité scientifique répondra aux propositions avant le 15 décembre 2020. Un forfait sera proposé aux intervenants afin de couvrir au maximum les frais de déplacement et d’hébergement.
La publication d’un volume des actes du colloque est prévue.
Comité d’organisation
Mathilda Blanquet, Simon Colombo, Juliette Souperbie (Université Toulouse II Jean Jaurès)
Comité scientifique
- Giulia Cicali (EHESS), Nicolas Cordon (HICSA - Paris I), S
- ophie Duhem (Université Jean Jaurès, Toulouse),
- Frank Fehrenbach (HamburgUniversität),
- Pascal Julien (Université Jean Jaurès, Toulouse),
- Emilie Roffidal (Université Jean Jaurès, Toulouse),
- Victor Stoïchita (Université de Fribourg).
Toulouse - Hôtel d'Assézat - 10 et 11 juin 2021
Argument
During the Renaissance, it became common to see bodies, both male and female, transformed and strategically exploited through artworks. Real or mythical, aged or juvenile, often bearers of a complex imaginary, they were conceived and perceived as metaphors and regularly used as propaganda devices. In early modern times, the representation of the body had a fundamental place in the process of exaltation and legitimation of the elite. Within the framework of this symposium, any commission exhibiting one or more bodies, intended to celebrate a form of political power, may be considered. The body has been apprehended as a political tool in historicizing studies, especially based on the concept of the two bodies of the king (Ernst Kantorowicz in the 1950s), while in the field of Art History, interest in political iconography has developed on the basis of the work of Aby Warburg. Since 1991, thanks to the impulse of Martin Warnke, the Warburg Haus in Hamburg has been carrying out research based on the exceptional index of documents and political images kept in their archives (e.g. the emblematic publication of the Politische Ikonographie manual. Ein Handbuch: Bd.1: Abdankung bis Huldigung. Bd. 2: Imperator bis Zwerg conducted by Uwe Fleckner, Martin Warnke and Hendrik Ziegler). Moreover, the researches of the french historian Gérard Sabatier, which expressed the interest in visual strategies in the service of the monarchy, demonstrates the development of these themes in France. As a matter of fact, it was the figure of the king that was favored, both in the works and in scientific events on the subject, as also attested by the conference presented in Blois in 2010: Roi cherché, roi montré, roi transfiguré. Corps politique et corps du pouvoir en Europe (XVe-XVIe siècles). "Body and Power" tends to emancipate from the figure of the prince - although central but not exclusive. Leaders rely on the idealization of their own person, in order to strengthen their preeminence. While their bodies were staged and glorified within their portraits - as an essential device to reassure or impress - they could also be juxtaposed with other elements. Then, in the field of gender studies, researches have shown how the male and female bodies maintain and exacerbate complex relations of domination within this iconography of power. The bodies of these secondary figures, enemies or allies, would intensify the message conveyed, being integrated within or beyond their images. In this way, all bodies could be discussed: those of the elites as well as those of the auxiliaries, intended to support the idea of power from a semantic perspective. Then, it will be necessary to question the elements which made this power concrete, visible and palpable. Ceremonial objects covered their bodies to transcend it while in response, bodies covered the objects in turn, all articulating a substantial discourse that should be deciphered. These same bodies were also found in palaces and other locations where authority was exercised. Within perennial as well as ephemeral decorations, they punctuated the facades through anthropomorphic orders, housed niches, adorned porticoes of triumphal entrances, inhabited fountains, chimneys, stairs, etc. In this case too, each of these expressions requires a reflection on its context of creation and exhibition, as well as on its purpose. The political dimension of these creations still deserves to be deepened, especially through the prism of what Victor Stoïchita describes as a constitutive heterogeneity of the body object (“l’hétérogénéité constitutive de l’objet corps” (in) Des Corps, Anatomie, Défense, Fantasmes, 2019). Therefore, the program revolves around the inherent relationship between the body and the polysemy of the terms "power" and "potency", denoting skills as well as strength or authority. The posture, the body language, the musculature attribute, the sensuality, the grace and the elegance that emanate from it, contribute to the translation of ideas. The body is both subordinated and esteemed by and for power and, like a mirror effect, it is also through its aesthetic, emotional and symbolic power that it honors and values the powerful ones. For so long the biblical reference served as a pretext for the exhibition of these bodies, the reappropriation of antique culture caused them to leave the private and sacred spheres to gain public space. This development testifies to a generalized understanding of the hermeneutic force, of the expressive and persuasive scope of the body whose evocative power develops with regard to the close relationship between physical impression and psychological aspect. These compositions full of vitality, affect and dynamism have given, from ambivalent and sometimes violent subjects, an emotional and sensory force essential to the process of political seduction. Then it is a question of appreciating the place of the senses - optical and haptic - in political iconography, both formally and semiotically. In short, the ambition of these two days is to explore issues related to the body carrying a political discourse, by mobilizing works created from the Renaissance to the dawn of the 19th century. By bringing together young and experienced researchers, both French and foreign, this event will make it possible to confront methodologies (formal, iconographic, aesthetic approaches...) by bringing together various case studies discussing these imposing, heroic, seductive, disquieting or repulsive bodies, whose anatomy was more or less unveiled to embody, among other things, the figure of the invincible victor as opposed to the vulnerable victim. Papers will explore topics fitting into these four main themes:
- The body as a figurative strategy in the representations of elites
- The power of the body: senses and emotions ignited in the political imagination
- Powers of the body in ceremonial objects
- The reigns of the body in princely decorations
Submission guidelines
Paper proposals should include a title and abstract (approximately 350-500 words in English or French), a brief bio-bibliography and contact information.
They should be sent by December 1
at the latest to the following address: corps.pouvoir@gmail.com.
The scientific committee will respond to proposals before December 15, 2020.
A package will be proposed to stakeholders to cover travel and accommodation costs as much as possible. The publication of a volume of the conference proceedings is planned.
Organizing committee
Mathilda Blanquet, Simon Colombo, Juliette Souperbie (Université Toulouse II Jean Jaurès)
Scientific Committee
- Giulia Cicali (EHESS),
- Nicolas Cordon (HICSA - Paris I),
- Sophie Duhem (Université Jean Jaurès, Toulouse),
- Frank Fehrenbach (HamburgUniversität),
- Pascal Julien (Université Jean Jaurès, Toulouse),
- Emilie Roffidal (Université Jean Jaurès, Toulouse),
- Victor Stoïchita (University of Fribourg).
Catégories
- Europe (Catégorie principale)
- Esprit et Langage > Représentations > Histoire culturelle
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Lieux
- Salle Clémence Isaure - Hôtel d'Assézat
Toulouse, France (31)
Dates
- mardi 01 décembre 2020
Fichiers attachés
Mots-clés
- histoire, histoire de l'art, art, politique, corps
Contacts
- Juliette Souperbie
courriel : juliette [dot] souperbie [at] gmail [dot] com - Mathilda Blanquet
courriel : m [dot] blanquet [at] hotmail [dot] fr - Simon Colombo
courriel : simon [dot] colombo [at] wanadoo [dot] fr
Source de l'information
- Juliette Souperbie
courriel : juliette [dot] souperbie [at] gmail [dot] com
Licence
Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la CC0 1.0 Universel.
Pour citer cette annonce
« Corps et pouvoir : le corps dans l’art politique des temps modernes », Appel à contribution, Calenda, Publié le mercredi 04 novembre 2020, https://calenda-formation.labocleo.org/812891