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La classe moyenne dans les pays arabes
الطّبقة الوسطى في البلدان العربية
The middle classes in Arab countries
Les transformations, les enjeux et les changements socioéconomiques. Approches comparatives
التحوّلات و الرّهانات و التغيّرات السّوسيو-اقتصادية. مقاربات مقارنة
Transformations, issues and socio-economic changes - comparative approaches
Publié le mercredi 19 octobre 2016
Résumé
L'accroissement du chômage des diplômés de l'enseignement supérieur, et de l'endettement, l'expansion de l'économie parallèle, la corruption galopante et la mauvaise gestion, la précarité touchant de plus en plus des franges différentes de la population ; sont tous autant de facteurs poussant encore plus fort vers une différenciation sociale inégalitaire. L'un des aboutissements de cette convergence de facteurs est la réduction-compression-effritement de la classe moyenne et la diminution de l'espace qu'elle occupait au sein d'une formation sociale, elle-même en pleine mutation ; le tout dans le sillage d'une rapide et galopante libéralisation économique. Afin d'élucider toutes ces problématiques et de les analyser. Ce colloque fait appel aux approches multidisciplinaires et ce dans le but d'approfondir le débat scientifique à propos de la classe moyenne dans les pays arabes.
Annonce
Argumentaire
Les transformations politiques que connaissent quelques pays arabes depuis plus de cinq années ont fait paraître de grandes disparités socioéconomiques entre les régions et en faisant un moteur principal des contestations et revendications sociales et un important facteur de mobilisation politique. Ainsi, de ce fait, la justice sociale s'apparente, chez quelques acteurs (partis, syndicats, associations, forums...) à la réduction de ces disparités et à leur éradication, à l'égalité entre régions et à la discrimination positive[1] au profit des régions pauvres.
En même temps et bien qu'ils soient fragiles, difficiles à réaliser et ayant des impacts multiples et différents sur la transition démocratique; l'entente et l'accord politiques entre les différents acteurs et élites politiques ont contribué à présenter la société comme étant un tout cohérent rassemblé en une unité nationale affrontant un ensemble de défis et de dangers (terrorisme, séparation...).
Tous ces événements surviennent alors que l'on observe l'expansion et la prépondérance d'une tradition politico-académique tendant, depuis des décennies, à occulter les disparités sociales et renonçant au lexique et vocabulaire qui évoquent les classes sociales et tout ce qui a trait aux luttes et aux conflits. Ceci s'explique, entre autres, par des facteurs politiques et idéologiques. Cependant, les évolutions socioéconomiques qu'ont connues la Tunisie et d'autres pays arabes (Libye, Syrie, Egypte, Yémen...) confirment que les crises économiques qui ont déclenché les "révolutions" arabes sont entrain de s'aggraver. En effet, la forte progression du taux de la pauvreté, l'accroissement du chômage des diplômés de l'enseignement supérieur, et de l'endettement, l'expansion de l'économie parallèle, la corruption galopante et la mauvaise gestion, la précarité touchant de plus en plus des franges différentes de la population; sont tous autant de facteurs poussant encore plus fort vers une différenciation sociale inégalitaire. L'un des aboutissements de cette convergence de facteurs est la réduction-compression-effritement de la classe moyenne et la diminution de l'espace qu'elle occupait au sein d'une formation sociale, elle-même en pleine mutation ; le tout dans le sillage d'une rapide et galopante libéralisation économique.
Depuis la régression des idéologies utopiques, les théories politiques contemporaines et celles s'intéressant à la transition politique se penchent de plus en plus sur le rôle de la classe moyenne dans le maintien de la stabilité et l'équilibre sociopolitiques. Alors que les uns pensent[2] que la transition vers la démocratie stipule et présuppose une croissance économique continue et une volumineuse classe moyenne, d'autres affirment[3] que la libre entreprise et le marché aboutiront à la constitution de groupes sociaux indépendants de l'Etat et à la consolidation des libertés individuelles, ce qui ouvrirait la voie à l'établissement d’une culture civile et à l'instauration et à l'institution de la démocratie. C'est dans le but d'approfondir le débat scientifique à propos de la classe moyenne dans les pays arabes, que ce colloque propose les quatre axes-thématiques suivants:
Premier Axe : Le concept et ses utilisations
Cet axe s’intéresse essentiellement au « champ conceptuel » qui s’est formé autour du concept de classe et en particulier celui de la classe moyenne. Malgré le cumul des approches théoriques et des études appliquées, le concept de classe moyenne demeure flou[4], aux contours non clairs[5]. Cette complexité s’accentue en présence des impacts des rapides transformations socioéconomiques et essentiellement la mondialisation des échanges commerciaux, de la part allant grandissante de l’économie parallèle[6], de l'évolution rapide du secteur des services et l’émergence irréversible de l’économie solidaire ?
La question reste entière quand à l’impact de ces facteurs sur l'essor de la classe moyenne dans les pays arabes et surtout ceux qui ont connu un rythme de croissance élevée: la classe moyenne a-t-elle vu sa base sociale s’élargir ou s’effriter ? Cette classe s’est elle appauvrie suite à la mondialisation des échanges économiques et aux différentes restructurations macro-économiques?
En fait, on s’interroge aussi sur la validité scientifique de ce concept ainsi que sur les capacités et perspectives analytiques qu'il offre, surtout dans un contexte où l’on observe des changements profonds des "modèles" de production et de ceux de développement (société de services, économie numérique, libéralisation du marché, politique de privatisation...). Que reste t-il de sa force opératoire alors que se forment progressivement de nouvelles formations sociales et qu’émergent, sur un rythme soutenu, de nouvelles couches socioprofessionnelles ayant de multiples sources de revenu.
Le recours de plus en plus soutenu à des notions telles que le partenariat social, l’unité sociale ou l’économie solidaire affecte l’utilisation actuelle du concept de classe moyenne et l’expose au risque de l’instrumentalisation politique, populiste et électorale. Risque d’autant plus réel vu l’enjeu de la légitimité que la classe moyenne peut offrir/assurer tant aux régimes qu’aux concurrents politiques. Risque scientifique d’autant plus aggravé qu’il va de pair avec le faible nombre des études qui font appel au concept de classe moyenne en tant que concept d’intelligibilité, en comparaison[7] avec les productions scientifiques autour du même thème, et parues aux années quatre vingt du siècle dernier.
Deuxième Axe : Indicateurs et variables
Quels sont ces indicateurs et variables servant à délimiter les contours de la classe moyenne, en général, et plus précisément l’appartenance à elle. Dans un contexte de changements économiques et sociodémographiques, les indicateurs souvent utilisés et faisant appel au revenu personnel, au grade professionnel et à la fonction, etc., suffisent-ils en tant que grille de lecture scientifique à saisir les statuts et les places sociales des individus ? N'est-il pas nécessaire et judicieux que soit menée une construction de nouveaux indicateurs et/ou l'amélioration de ceux utilisés en vue d'une plus grande souplesse à même de prendre en compte ces transformations sociales et permettant à cette notion de classe moyenne de mieux saisir la pluralité des statuts, places et positions ? Une construction à même de rendre compte des mutations et changements que connait la classe moyenne au niveau de la diversité des couches et des groupes qui la composent. L'on s'interroge sur les enjeux scientifiques accompagnant ces révisions méthodologiques de la grille conceptuelle d'intelligibilité ?
Troisième axe : Les niveaux historiques et anthropologiques.
L'on s'intéresse aux caractéristiques historiques de la classe moyenne et aux façons dont ses individus se représentent et comprennent leur appartenance sociale, leur "conscience de classe", leurs statuts et leurs rôles. Les profils et les spécificités des couches et des groupes appartenant à cette classe présentent des changements continuels touchant l'ensemble de leurs valeurs, représentations sociales, comportements, choix et images (consommation, propriété, mariage, formes de religiosité, pratiques culturelles, goûts artistiques...). Changements accentués du fait que cette classe connaisse l'arrivée et le départ fréquents de nouveaux groupes et couches sociales. À titre d’exemple comment interviennent le diplôme universitaire, le projet entreprise- privée, la propriété immobilière-foncière et les origines familiales, dans l’appartenance à cette classe moyenne? Quel impact ont-ils sur les trajets sociaux des individus de cette classe et sur la formation-constitution de leurs profils personnels ?
La mobilité sociale, la migration, la décroissance démographique, le mariage, la famille et les formes nouvelles de religiosité accompagnées parfois par la violence et l’extrémisme religieux, sont d’autres facteurs clefs endogènes et exogènes, à prendre en considération pour que l’on comprenne les fortes mutations et les profonds changements qu’à connus cette classe ? L’on s’interroge aussi à propos des capacités de cette classe à se forger-constituer, historiquement « une place et des spécificités » l’émancipant et l’affranchissant de l’hégémonie confessionnelle, clanique et tribale et/ou si elle reste profondément imprégnée par les structures sociales traditionnelles ?
Quatrième axe : La classe moyenne et la transition démocratique
Quelques-unes des problématiques de cet axe soulèvent la question de savoir si le développement et l'ancrage de la démocratie présupposent obligatoirement l'existence d'un marché libre, d'une classe moyenne, de petites et moyennes entreprises, d'entrepreneurs indépendants de l'Etat ? Les hauts cadres et fonctionnaires de l'Etat s'opposent-ils à la transition démocratique? Se dressent-ils contre toute limitation des pouvoirs, prérogatives, attributs et missions des structures de l'Etat ? La dynamique et l'efficacité de la société civile dans une société démocratique sont-elles tributaires d'une classe moyenne forte et indépendante de l'appareil bureaucratique ? Peut-on déceler et observer des concordances ou des oppositions entre les intérêts des différentes couches de cette classe moyenne et ceux des hauts cadres de la fonction publique et des libres entrepreneurs ? Quel impact, cela aura-t-il sur les tendances intellectuelles et idéologiques et sur les choix politiques de chacun d'autre-eux ? Quels sont les rapports sociopolitiques entre l'Etat et la classe moyenne pendant la phase de transition démocratique ? Quelles sont les logiques qui les sous-tendent et en forment les piliers et les soubassements ? La classe moyenne s'oppose-t-elle au clientélisme de l'Etat, et à quel prix ? Comment et à quel point la situation de classe et l'appartenance sociale des individus de la classe moyenne dictent, influencent et pèsent sur leurs prises de position politique, leurs comportements électoraux, leur engagement politique, leur participation associative et leurs intentions de vote ?
Afin d'élucider toutes ces problématiques et de les analyser; ce colloque fait appel aux approches multidisciplinaires et ce dans le but de mieux cerner et mieux comprendre les transformations et les changements sociaux que vivent les sociétés arabes dans leurs dynamiques de production-reproduction de classes et couches sociales aussi différentes que diverses.
Notes
[1] À titre d'exemple la constitution tunisienne de 2014 évoque dans l'article 12 le "principe de l'inégalité compensatrice"
[2] Lipset, S. (1959): « Some Social Requisites for Democracy: Economic Development and Political Legitimacy », American Political Sciences Review, 53: 69-105.
[3] Zartman, I.W. (1995), « la conduite de la réforme politique : le chemin de la démocratie » in Zartman, I.W. Tunisie : la politique économique de la Réforme. Tunis : Alif : 21-43.
[4] Bosc Serge. (2008), Sociologie des classes moyennes, Paris, la découverte.
[5] Damon Julien (2013), Les classes moyennes, Paris, PUF.
[6] Ben Romdhane Mahmoud (2011), Tunisie, État, Économie et Société, Tunis, Sud éditions.
[7] Gherib Baccar, « Les classes moyennes tunisiennes entre mythes et réalités. Eléments pour une mise en perspective historique ». L’Année du Maghreb, VII/2011, CNRS édition, p 419-435. Nous renvoyons aussi à l’excellent ouvrage collectif, dirigé par le sociologue Abdelkader Zghal (1980), intitulé Les classes moyennes au Maghreb ainsi qu’aux deux thèses d’État, celle de Mahmoud Ben Romdhane (1981) Accumulation du capital et classes sociales en Tunisie et celle de Hacine Dimassi (1983) Accumulation du capital et répartition du revenu. Essai sur la reproduction de la formation sociale en Tunisie.
Comité scientifique
- Kchaou Mounir : Professeur d’enseignement supérieur et chercheur en philosophie à la Faculté des Sciences Humaines et Sociales de Tunis – Université de Tunis.
- Melliti Imed : Professeur d’enseignement supérieur à l’Institut Supérieur des Sciences Humaines de Tunis – Université de Tunis et chercheur à l’Institut des Recherches sur le Maghreb Contemporain, Tunis.
- Maatoug Faraj : Maître de conférence et historien chercheur à la Faculté des Sciences Humaines et Sociales de Tunis – Université de Tunis.
- Mehdi Mabrouk : Maître de conférence et sociologue chercheur à la Faculté des Sciences Humaines et Sociales de Tunis – Université de Tunis.
- Soussi Mouez : Maître de conférence et économiste chercheur à l’Institut des Hautes Etudes Commerciales de Carthage – Université de Carthage.
- Hfaiedh Abdelwahab : Maître de conférence et sociologue chercheur à la Faculté des Sciences Humaines et Sociales de Tunis – Université de Tunis.
- Ayari Adel : Maître assistant, sociologue et chercheur en sociologie des entreprises.
Dates
- Date du colloque : 13-14-15 avril 2017 à Tunis
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Date limite de l’envoi des résumés : 25 Novembre 2016
- Notification des résultats des évaluations : 10 Décembre 2016
- Date limite de soumission du texte final (full paper): 15 Février 2017
Conditions de participation
Remplir la fiche d’inscription ci-jointe ou disponible sur www.carep.tn
Envoi des projets de communication:
- Remplir la fiche ci-jointe
Envoi des résumés : La soumission de résumé doit comporter : un titre, un résumé de 500 à 700 mots, incluant la problématique soulevée, la méthodologie de recherche et les principales idées, 05 mots clés, une bibliographie sommaire. Tout en respectant les conditions scientifiques de la rédaction, de la saisie des notes de bas de page et de la bibliographie.
- Caractère : Times New Roman 12 pour le français et l’anglais, et Sakkal Majalla 14 pour l’arabe.
- Langue du colloque : Arabe – Français - Anglais.
- Ne pouvant être accepté tout article déjà publié ou ayant participé à une autre manifestation scientifique.
Les soumissions doivent être envoyées à l’adresse électronique suivante : carep.tn@gmail.com
Informations générales
Le Centre Arabe des Recherches et de l’Etude des Politiques (CAREP) prendra en charge :
- transfert hôtel-aéroport-hôtel,
- hébergement en pension complète pour 3 nuitées pour les participants résidant à l’étranger.
- hébergement en pension complète pour 2 nuitées pour les participants résidant en Tunisie.
Tous les extras (téléphone, boissons alcoolisées, etc.) sont à la charge des participants.
En cas de nécessité le CAREP offrira un billet d’avion électronique aller-retour pour les participants résidant à l’étranger.
Publication
Les travaux de ce colloque seront publiés ultérieurement.
Pour toute information, veuillez contacter :Carep.tn@gmail.com
Ou
00216 23 470 863 / 00216 70 147 384
Catégories
- Sociologie (Catégorie principale)
- Sociétés > Ethnologie, anthropologie > Anthropologie sociale
- Sociétés > Économie > Économie politique
- Espaces > Afrique > Afrique du nord
- Sociétés > Ethnologie, anthropologie > Anthropologie politique
- Sociétés > Études du politique > Sociologie politique
- Sociétés > Histoire > Histoire sociale
Lieux
- 10 rue Tanit - Notredame
Tunis, Tunisie (1082)
Dates
- vendredi 25 novembre 2016
Fichiers attachés
Mots-clés
- classe moyenne, changement socio-économique, transformation, الطبقة الوسطى ,التغيرات السوسيو اقتصادية ,التحولات
Contacts
- Organisateurs du colloque « La classe moyenne dans les pays arabes »
courriel : carep [dot] tn [at] gmail [dot] com
URLS de référence
Source de l'information
- Henda Ghribi
courriel : carep [dot] tn [at] gmail [dot] com
Licence
Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la CC0 1.0 Universel.
Pour citer cette annonce
« La classe moyenne dans les pays arabes », Appel à contribution, Calenda, Publié le mercredi 19 octobre 2016, https://calenda-formation.labocleo.org/380357